ITW : Damien Baillet pour le Festival Prenez Place(s)

5 décembre 2016 /// Les interviews
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Du 2 au 5 juin 2017, Avignon découvrira son premier festival de rue des arts vivants et visuels, le prénommé Prenez Place(s). Interview de l’énergique Damien Baillet, directeur de Surikat Production et porteur du projet.

Afin de comprendre le pourquoi de la création d’un festival des arts de rue à Avignon, il est nécessaire de tirer sur le fil de la pelote de laine pour dérouler le parcours de Damien Baillet, dans le milieu du spectacle vivant. Il est, ce que l’on pourrait appeler, la relève ou la jeune garde des initiateurs pour le spectacle vivant à Avignon. J’imagine, aisément, qu’il n’appréciera pas cette dénomination car il n’agit pas pour sa gloire, mais en tant que passionné pour une ville dans laquelle il sait qu’il y a des multitudes de choses à faire.
Mais revenons à cette pelote de laine. C’est en 2007 que l’on retrouve Damien Baillet en tant que chargé de diffusion pour la compagnie le Théâtre du Kronope. En 2008, il se voit confier les clés du théâtre La Fabrik’. Pour lui c’est un vrai plaisir et un rêve qui se réalise. Il restera 3 ans à ce poste et développera la programmation, avec le technicien général de l’époque, Jonathan. On leur doit notamment Les contes à croquer qui continuent d’animer le lieu les mercredis après-midi, une fois par mois. L’équipe accueille également beaucoup de compagnies émergentes en résidence et se rendent compte qu’ils sont les seuls à recevoir des artistes émergents sur Avignon.
Et c’est cela qui l’amène à créer, en 2010, la structure Surikat Production pour porter le festival Émergence(s), festival de compagnies émergentes.
3 ans plus tard, l’équipe de Surikat Production fait un point sur leurs activités et Damien décide de créer la plateforme de mutualisation et de diffusion pour les artistes émergents. A ce moment là, la diffusion des compagnies prend son envol.
En 2016, après 3 années économiquement difficile, un tournant s’annonce avec l’arrêt du festival Émergence(s) et une restructuration totale de Surikat Production. Et nous en sommes là.

2016 est une année de mutation pour toute l’équipe de Surikat Production avec un certain intérêt pour les arts de rue et du cirque…
Damien Baillet : On continue la plateforme, jusqu’à la fin de la saison, avec les artistes que l’on a accompagné sur le festival d’Avignon cette année. On poursuivra le travail avec 3 des compagnies de la plateforme car ce sont des compagnies d’art de la rue. Il y a les Venez voir ! et on crée une école de cirque. Nous avons concentré toutes nos activités sur la rue et le cirque. Nous sommes sortis des salles complètement.

Venez voir !

« Venez voir ! »

C’est donc une réelle volonté ?
Damien Baillet : Et totalement assumée. C’est une question de mentalité déjà, car le milieu des arts de la rue n’est pas le même que celui de la salle. C’est une question pour moi de me sentir à ma place. Tout vient des deux saisons de Venez voir ! (ndlr les derniers dimanches des mois de mars, avril, mai et juin, Surikat Production programme des compagnies des arts de rue dans les parcs d’Avignon). Je me demandais alors pourquoi je travaillais autant, pourquoi je développais de nouveaux projets. Ce n’était pas pour la gloire, car de cela je m’en fous, pas pour l’argent, car cela se saurait, mais je faisais les Venez voir ! pour créer des émotions communes autour d’un spectacle et surtout pour faire se rencontrer des personnes qui ne se rencontrent jamais, car si il y a rencontre, c’est toujours dans le négatif, alors que là on est dans le positif.
Avec le festival Émergence(s), on avait une très belle communication, des tarifs très bas, des partenariats avec l’Université, Cultures du cœur, mais on était quand même bloqué car il y avait, pour le public, un seuil de porte à franchir. On s’institutionnalisait et on ne le voulait pas du tout. Et pour ce faire, il fallait aller dans la rue.

 

Est-ce que les arts vivants de la rue, dans toutes leurs formes, participent vraiment à ce que l’on peut appeler la démocratisation culturelle ?
Damien Baillet : Totalement. Et c’est la pince en or de la démocratisation culturelle. C’est le moyen le plus efficace sur l’émancipation du public et l’individuel. On peut récupérer le public. Les arts de rue peuvent être le palier intermédiaire pour inviter les gens à avoir une pratique culturelle et de les faire rentrer dans une salle ensuite.

En ce qui concerne la ligne artistique, où est placé le curseur ?
Damien Baillet : J’ai vu une centaine de spectacle en deux mois Juillet et août. J’ai fait Aurillac, Châlon, Font’arts, Midi Pyrénées fait son cirque, les petites formes à Montfavet. Il y a une vraie ligne artistique pour le festival Prenez Place(s) et plusieurs curseurs sont en action que ce soit sur la qualité, que le spectacle soit accessible à tous, pas complètement dingo, et surtout que lorsque le spectacle se termine, que quelque chose ai bougé en nous en tant que citoyen, écolo, amoureux… Les gens sortiront des spectacles en se disant : je vais aller plus loin dans ma réflexion car ce que je viens de voir m’a apporté ça. Et c’est pour cela que ça s’appelle Prenez Place(s). Il y a le côté « installez-vous », mais aussi le côté pour que le citoyen reprenne sa place dans l’espace public et puisse réinterroger cet espace avec des « qu’est-ce que l’on peut faire ? », « qu’est-ce que l’on ne pas y faire ? »… On réinterroge tout ça dans le contexte d’aujourd’hui, qui est loin d’être folichon. On va aussi tenter d’éviter l’écueil de la consommation de spectacles. On a programmé des spectacles fédérateurs avec lesquels le public va vivre une expérience commune.
Pour résumer, ma ligne artistique est de faire bouger les lignes émotionnelles chez tout un chacun et les rendre actif.

prenezplacesfinalweb

Quel est le budget de Prenez Place(s) ?
Damien Baillet : Le budget global de Prenez Place(s) est de 90 000 euros, alors que pour le festival Émergence(s), le budget était de 45 000 euros. On double le budget pour les trois jours car l’équipe souhaite payer tous les artistes présents, les loger. C’est pour cette raison que notre campagne de communication, lancée cet été, était : En juillet 2016, les artistes paient pour jouer dans des salles. En juin 2017, ils seront payés pour jouer dans la rue.
Pour trouver ces 90 000 euros, la solution est de multiplier les sources de finances qu’elles soient publiques ou privées afin qu’elles soient les plus nombreuses possibles. Ma philosophie est la suivante : je préfère avoir 300 personnes qui vont donner 2 euros, plusieurs fois, que 100 personnes qui donneraient que 10 euros, en une seule fois. C’est la multiplication des financements qui fera levier.
J’ai rencontré toutes les tutelles habituelles de Surikat. On a lancé un crowdfunding, pour une somme de 3 500 euros, et les démarches auprès des entreprises et des partenaires privés, qui nous ont déjà accompagnés sur le festival Émergences, sont entreprises. Le public sera aussi sollicité de 3 façons, le chapeau, les boissons et la restauration.
Le projet est de tout centraliser dans un seul et même espace pour les soirées.

Quelles ont été tes réflexions pour construire ce premier festival ?
Damien Baillet : En ce moment, il y a beaucoup de questions au niveau national sur la forme que doit revêtir un festival des arts de la rue. Je me suis inspiré un peu de toutes les réflexions des artistes, de ce que disaient les directeurs également, pour faire un nouveau festival, que j’espère idéal, dans lequel les artistes seraient nourris, logés…

Combien de compagnies retrouverons-nous durant le festival et quels seront les lieux ?
Damien Baillet : Il y a pour l’instant 24 propositions artistiques et il n’y a pas de petites ou de grosses compagnies, ni de in, ni de off. Toutes les compagnies sont invitées.
Il y a 2 grosses équipes techniques : la Grosse B, basée à Toulouse, et Estock Fish, de Lançon. Il y a Raoul Lambert, Muerto Coco, La King Size Cie, OXYPUT Cie, le Collectif Le Bleu d’Armand qui sort dans la rue pour Chienne de vie, Corps de passage, le Théâtre du Kronope pour Roméo et Juliette.
Les grosses formes techniques seront concentrées sur le parking des Italiens. Pour les autres lieux, le public se déplacera dans divers parcs et quartiers de la ville : Chico Mendès, Clos de la murette, départ Place de la Méditerranée à Monclar pour un déambulatoire, Square de Chantal Lamouroux à la Reine Jeanne, place du petit palais, place des Carmes, Monument aux morts.
Et en soirée, il y aura des concerts.

Les arts visuels également seront exploités.
Damien Baillet : Avec deux artistes avignonnais, Pablito Zago et Yoann Lagarde. Il y aura deux fresques monumentales, un jam des artistes avignonnais sélectionnés et un jam ultra-ouvert sur le parking des italiens.

Surikat Production est reconnue Pépite culturelle d’Avignon. Concrètement, cela apporte quoi ?
Damien Baillet : Des superbes relations avec la mairie d’Avignon, et ça c’est chouette. Ils m’ont donné leur reconnaissance pour le travail que l’équipe et moi fournissons pour Avignon. Le label nous permet de travailler beaucoup avec la mairie. On travaille sur des projets différents, en plus de Prenez Place(s), qui vont être très bien pour la ville.
Cette année, la mairie nous a soutenu à hauteur de 10 000 euros. Ce que j’aime, c’est entendre les gens qui se plaignent mais qui ont des sommes à 6 chiffres.
J’aime bien les 3 autres pépites qui sont le Théâtre Golovine, les Arts au coin de ma rue et Avignon Ateliers d’Artistes.

Dans l’attente de découvrir ce premier festival de rue des arts vivants et visuels, quel va être le planning de Surikat Production ?
Damien Baillet : La programmation des Venez voir est bouclée et on les retrouvera tous les derniers dimanches de mars, avril, mai, juin. Ensuite, il y a l’école de cirque avec les stages durant les vacances scolaires et en juillet extra-muros. A partir de septembre 2017, l’école ouvrira ses portes avec de très gros partenariats mais on en reparlera plus tard. On travaille beaucoup mais tout va bien.

Afin de mettre des visages sur l’équipe de Surikat Production :

Le festival Prenez Place(s) aura lieu du 2 au 5 juin.
Toutes les informations, ici

Laurent Bourbousson

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