ITW : Pierre-Benjamin Nantel, parcours de danseur

24 mai 2017 /// Les interviews
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Fin d’année pour les étudiants-artistes-chercheurs du master Exerce à l’ICI-CCN de Montpellier. Hier soir, Pierre-Benjamin Nantel présentait Parrhésia, un duo performatif. Interview.

Vous êtes arrivé tard à la danse. Pouvez-vous nous raconter cette découverte ?
En fait, j’ai toujours dansé, dans ma chambre dans un garage ou entre amis. J’ai toujours eu un immense plaisir à danser et la première fois que je suis entré dans un studio de danse j’étais beaucoup plus intéressé par le lieu que par les cours.
Ce que je voulais, c’était un accès à ces studios immense ou l’on peut écouter de la musique, bouger librement et rêver. Un studio c’était et c’est toujours d’ailleurs comme une immense chambre d’adolescent.
J’ai suivi une formation de karaté de mes 6 ans jusqu‘au bac. Après ma première année de médecine, j’ai hésité à reprendre cet art martial. Par curiosité et désir d’accéder à un studio de danse je me suis inscrit à un atelier chorégraphique de la fac. J’y ai rencontré Hélène Paris, une professeure de danse mêlant pratique martial et pratique dansée. Ce fut une magnifique rencontre qui me porte encore aujourd’hui. C’est par là que tout à commencé.

Vous avez un doctorat de chirurgie dentaire et vous exercez dans ce domaine. Comment en arrive-t-on à présenter le master Exerce ?
Le master Exerce fut une formidable opportunité pour moi. En effet depuis longtemps je souhaite exercer une double activité, un double mi-temps Artiste/Dentiste. En fait c’est justement au contact d’Hélène Paris que s’est affirmé un appétit pour la création.
Dans le passé j’ai pu collaborer avec des artistes qui avaient reçu une formation aux Beaux Arts ou au Conservatoire et je me suis formé à leur contact, par capillarité disons.
Le master Exerce me permet de prendre un temps pour me former, pour étudier, pour réfléchir et poser mes problématiques, une chance que je n’avais jamais eu avant. Je sens aujourd’hui que cette expérience constituera un socle sur lequel je vais poursuivre mes recherches notamment sur les questions du soin et des gestes efficients.
Mon actualité s’est enrichit au fil des rencontres qui furent nombreuses et cela m’a permis de verbaliser et de situer mon travail.
A travers les différentes présentations publiques, j’ai pu tester différentes adresses comme une performance pour un seul spectateur reprenant le format de la consultation médical, ou encore une déambulation rituelle dans la chaufferie du CCN de Montpellier.

Vous avez également 10 années de pratique de karaté. Est-ce que cet art martial n’est-il pas, de par sa forme, un art chorégraphique ?
A bien des égards c’est le regard et le contexte qui définissent la nature artistique ou non d’une gestuelle.
Cela dépend aussi du sens qu’on met derrière le mot art. Le mot art peut être un synonyme de technique et c’est en ce sens que l’on parle d’art martial ou même d’art dentaire.
L’art chorégraphique relève d’une pratique et d’un engagement pour une part technique mais également profondément artistique.

Comment percevez-vous le métier de chorégraphe ?
Pour moi c’est avant tout l’endroit d’une expression artistique et d’une émancipation personnelle. C’est une façon d’adresser ce qui m’agite et de donner une forme et un contexte à des rencontres.

Pouvez-vous nous parler de Parrhésia, le travail que vous avez présenté lors de votre prestation à la soirée Exerce du 23 mai ?
Parrhésia signifie en grec ancien: franc parler. Ce travail est un duo performatif, une collaboration avec le plasticien sonore Octave Courtin et la dramaturge et plasticienne Marylise Navarro.
Parrhésia met en scène la rencontre d’un danseur et d’un artiste sonore tous deux en recherche d’un point de densification intense. Un remède peut être ?
Cette performance propose une danse lente, chancelante, oscillante. Une évolution quasi rituelle, modifiée et perturbée par l’action de poids déposés par le musicien tantôt sur des cornemuses tantôt sur le corps du danseur.
Se libérer d’une pesanteur enfouie, d’un passé, d’un trauma, mais aussi chercher un souffle commun. Ce duo est une quête d’écho et d’écoute des corps.

Comment envisagez-vous votre avenir ?
Alors en ce moment j’ai un rêve… Si je me projette à long terme, j’aimerais investir dans un lieu de travail dans lequel je pourrais exercer mes deux activités. Un cabinet dentaire et un studio de danse, un lieu où mes pratiques viendraient cohabiter physiquement. Un lieu où je pourrais embauché un(e) assistant(e) dentaire/administrateur !

Comment définiriez-vous votre danse ?
Actuellement c’est très difficile de répondre à cette question. J’ai le sentiment de ne pas avoir assez de recul. Si je tente une définition précaire et provisoire, je dirais que ma danse est faite d’imaginaire et d’histoire. J’ai le sentiment de porter dans mes gestes un passé élargi, personnel et culturel. Dans le bras que je lève, il y a le mouvement d’un karateka, d’un fils, d’un occidental, d’un danseur, d’un chirurgien dentiste, d’un amoureux, d’un breton aussi….Dans le bras que je lève il y a aussi le souci d’une adresse et la responsabilité d’une prise de parole publique.

Propos recueillis par Laurent Bourbousson

Parrhésia a été présenté lors de la soirée du 23 mai 2017 à l’Institut Chorgraphique National-Centre Chorégraphique National de Montpellier.

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