[ITW] Emma Daumas & Nicolas Gruppo Forté pour Curiosity
Rencontre avec Emma Daumas et Nicolas Gruppo Forté pour Curiosity, l’événement en cette fin de semaine sur Avignon. Une proposition à vivre en deux temps : à l’Utopia-Manutention pour la projection du film culte de Tod Browning, Freaks, et au Délirium, pour la soirée Curiosity, à la croisée de disciplines diverses et variées.
Quand tout est question de rencontre
OAP : La soirée Curiosity est née d’une envie commune, celle des deux artistes que vous êtes. Vous n’en êtes pas à votre première collaboration.
Nicolas Gruppo Forté : Oh non ! On a déjà sévi tous les 2.
Emma Daumas : Cela fait 4 ans que l‘on travaille sur une forme de numéro de cabaret qui a pour titre Freaks on the rock (ci-contre). Nous l’avons présenté au festival Sonorités à Montpellier, au Délirium et notamment cette année durant le Festival d’Avignon pour La nuit sans retour. Nous avons exploré cette forme et on souhaitait l’augmenter et proposer quelque chose autour. Cette soirée nous permet de questionner plus amplement la thématique du « Freak ». Le programme émane de plusieurs choses : des échanges avec Utopia, de la performance que nous faisons et de mon association Les Enfants Sauvages music. On a invité Nicolas pour cette carte blanche pour laquelle il convie les artistes rêvés pour faire son film, car c’est un vidéaste. Il pense cette soirée par séquences, par tableaux, par confrontations d’images, de sentiments, de mises en tension.
Le film Freaks
OAP : La projection de Freaks, la monstrueuse parade va ouvrir cet événement, à l’Utopia-Manutention à 19h. Vous donnerez une conférence à la suite du film.
N. G. F. : Lorsque l’on parle de ce film aux gens, beaucoup pensent tout de suite au monstre alors que je pense désir, parce que Tod Browning est un cinéaste du désir. Pour moi, il a été incompris. Ce réalisateur ne faisait pas des films sur les monstres mais des films avec des monstres pour questionner le désir. Notre ambition pour cette soirée, s’il y en a une, c’est de prendre ce questionnement et de l’illustrer avec des formes très étranges, douces, violentes parfois. On va traverser…
E. D. : …la nuit !
OAP : Pourquoi avoir appelé la soirée Curiosity ?
E. D. : On va questionner tout ce qui bouleverse, gêne, dérange, horrifie et fascine. C’est tout ceci que voulait soulever Tod Browning dans ses réalisations. Toute cette imagerie et cette esthétique assez forte tournent autour des monstres forains et des cabinets de curiosités. Tout cela englobe ces questionnements autour de la curiosité, de l’étrange.
N. G. F. : La curiosité est un terme à double tranchant !
E. D. : Elle peut être source d’apprentissage et d’émerveillement, et à l’inverse très malsaine et attiser les instincts les plus bas de l’humanité.
La soirée Curiosity
OAP : Justement, comment avez-vous rêvé cette soirée ? Emma parle d’un film. Est-ce que vous avez écrit un scénario ?
N. G. F. : Je n’écris jamais de scénario. Pour construire cette soirée, j’avais besoin de travailler sur des confrontations, un peu comme ma rencontre d’avec Emma. Pour notre performance, ce qui m’intéressait, c’était de partir de nos contrastes : allier sa beauté à mon handicap, sa maîtrise de sa voix à mes tâtonnements à la guitare. J’ai rêvé de cette soirée comme ça. Confronter différentes matières car ce qui m’intéresse c’est la rencontre.
E. D. : Nous avons retravaillé notre performance avec Marie Hennerez, découverte cet été dans Smoke Rings. Elle joue également dans Plus belle la vie. Son univers se confronte à celui de Nicolas et au mien, et c’est ce qui intéresse vivement Nicolas.
On retrouvera David Noir, un transformiste qui cherche les extrêmes, le groupe Guappecarto qui nous vient d’Italie avec tout un univers théâtral, une battle de dj’s… enfin de faux dj’s.
N. G. F. : Mais pas du tout faux !
E. D. : Je vous laisse juger avec les noms. On aura donc Le Mime Puceau, Zébulon le Dragon et Nicolas, aka Prout on the Pop. Ils vont suivre le protocole suivant : chacun diffuse deux titres et se passe la main en se répondant en musique.
N. G. F. : Ce qui m’intéresse dans cet exercice, c’est que ça devienne très festif, une sorte de boîte de nuit chaotique, que ça danse, que l’on fasse la fête. Pour faire le lien avec l’idée du cabaret, il faut qu’il y ait de la bonne humeur pour arriver au tragique.
E. D. : Il y a aussi la possibilité qu’un spectre pianistique vienne hanter la soirée. Ce sera une soirée de totale liberté car le cabaret représente la forme la plus libre du spectacle vivant.
OAP : Tout ceci pour éveiller le désir ?
N. G. F. : Je ne donne pas de réponses à tout ceci. Moi je pose une question.
OAP : Je reformule alors, est-ce pour montrer les différentes formes de désir existantes ?
N. G. F. : Tu as raison, c’est pour montrer comment s’amuser avec tout ça. On part de ce postulat mais j’espère que l’on ne va pas rester coincé sur le désir et qu’il y aura de l’amour à la fin. Ça fini comme ça de toute façon le désir. rires.
L’association Les Enfants Sauvages music
L’association vient de la rencontre de 4 personnes raconte Emma : « Frédérique, Maïa, Marie et moi. Chacune à son parcours : de la directrice artistique et communication à tourneur en passant par l’administration culturelle pour arriver à la musique. On souhaite mettre tous nos savoir-faire dans un projet global. Nous nous sommes aperçues que beaucoup de professionnels sont décentralisés en région. On souhaite mettre en lumière des lieux, des artistes de notre région pour montrer qu’il se passe aussi des choses ici. La région est attractive. On souhaite installer une dynamique autour de la musique et de l’art dans toutes ses formes. Nous avons organisé, en juillet, une Scène découvertes auprès des professionnels. L’idée de travailler en réseau est bien présente. Il y a, également, une volonté d’accompagner des projets – de la production à la réalisation – à envergure nationale. Mon projet de spectacle L’art des Naufrages est un projet pilote. Il sera créé le 18 mai prochain au Théâtre du Chêne Noir (Avignon). On soutiendra d’autres projets par la suite.
Les Enfants Sauvages music, c’est l’envie de développer et de défendre des projets innovants, à la croisée de certains chemins, et d’accompagner des artistes sur le territoire. »
Propos recueillis par Laurent Bourbousson
Freaks, la montrueuse parade à Utopia-Manutention. Projection dans le cadre de Curiosity le vendredi 19 octobre à 19h
Curiosity, Carte blanche à Nicolas Gruppo Forté, à partir de 22h, au Délirium – 2 rue Mignard – Avignon.
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