[ITW] OFF19 : Yann Karaquillo pour L’acte d’amour
Attention événement au Théâtre des Carmes, demain, jeudi 18 juillet, à 14h. Yann Karaquillo proposera la lecture de son texte théâtral L’Acte d’Amour (tragi-comédie à machines et musiques) par Denis Lavant, qui interprétera les 13 personnages, avec pour compagnon de musique Laurent Rousseau. Interview.
En 2014, Yann Karaquillo était comédien pour Michel Bruzat dans L’Acteur Loup d’André Benedetto au Théâtre des Carmes. En 2019, il revient dans ce théâtre qu’il affectionne particulièrement pour présenter une lecture, celle de son texte de théâtre L’Acte d’Amour (tragi-comédie à machines et musiques). Denis Lavant sera la voix et le corps des 13 personnages de cette féérie fiévreuse, comme son auteur la définit.
La rencontre avec Denis Lavant
Comment avez-vous rencontré Denis Lavant et est-ce que cela a été difficile de lui faire accepter de jouer tous les rôles que compte ce texte ?
C’est par l’intermédiaire d’une amie que je l’ai contacté. Je lui ai fait part du texte qu’il a trouvé formidable. Je lui ai proposé, dans un premier temps, le projet avec les 13 acteurs. Avant de lui dire que peut-être on ne pourrait pas le monter pour des raisons de coûts, je lui ai dit que j’avais une autre idée, celle de lui faire interpréter tous les personnages, ce qui est colossal au théâtre. « Oui d’accord » a été sa réponse.
L’acte d’amour
Le public va découvrir la lecture de L’Acte d’Amour (tragi-comédie à machines et musiques). Comment l’avez-vous travaillée ?
Elle sera mise en musique pour l’occasion par Laurent Rousseau. C’est une aventure que j’espère dans la longueur afin de pouvoir mettre ce texte en scène avec Denis Lavant. Cette lecture prendra également une dimension particulière car j’ai joué dans ce lieu. J’aime énormément la famille Benedetto.
Comment avez pensé l’écriture du texte ?
C’est du théâtre de chambre, presque immontable. Il y a quelque chose de baroque avec des précisions infimes dans les didascalies. Je ne l’imagine pas monter autrement que comme il a été écrit. Je pensais que ce texte allait rester dans un placard. Denis Lavant m’a convaincu de jeter des bouteilles à la mer. Il est assez coutumier du fait. D’ailleurs son anagramme est Destin Naval. [rires]
Qu’est-qui a déclenché son écriture ?
[silence] Oh la la… j’ai peur d’être ronflant en répondant très honnêtement. J’aimerai venger des amis, des proches ou des lointains, si c’était possible le temps d’un spectacle. Les intentions de la compagnie sont de purger des passions communes dans cette époque assez inédite, je la vis comme ça en tout cas.
La direction d’acteur
Comment avez-vous dirigé Denis Lavant ?
D’abord on est dans ses petits souliers. C’est quelqu’un de très curieux et d’attentif aux souhaits de l’autre. Je regardais les premiers films de Léo Carax, dans lesquels Denis a joué. Ils sont fondateurs pour moi. Je me retrouve, aujourd’hui, devant cet enfant sauvage que l’on découvrait alors. Est-ce que l’on dirige donc Denis Lavant ? Oui et non. C’est un peu ce que dit André Benedetto de l’acteur, « il y a une confiance absolue aux acteurs » . Il se prête au jeu de changer de rythme, de couleurs. Il est force de proposition. Mais cela demeure une lecture. La mise en scène n’a pas vraiment commencé. Nous sommes plutôt sur la précision des choses et il l’est. Il est d’un professionnalisme absolu. Nous nous serons vus 5 journées pour ce texte colossal. La chose sera brouillonne, mais je n’avais pas envie de m’en passer. C’est un bonheur.
Vous n’aviez pas envie de porter votre texte ?
Dans les moments de désespoir, qui sont nombreux quand on monte une production et si par hasard je n’arrivais à pas la monter, je le créerai dans la rue. Ce ne serait pas pour faire du théâtre de rue, mais pour le faire dans des cadres non officiels. Je le ferai avec rien et moi, pour porter cette parole, même si elle m’échappe en très large partie.
Ce n’est pas la première fois que je mets en scène un de mes textes, mais de ce type-là, c’est très nouveau pour moi.
Est-ce que le texte pourrait prendre la forme d’un happening ?
Oui. Il n’est pas impossible qu’il y ait des versions comme tel, comme un acte militant, au sens politique. Cela éviterait les lourdeurs de passer son temps à faire de la diffusion, de la production.
La relation avec Denis Lavant
Denis Lavant et vous faites partie des personnes que l’on pourrait définir comme des passionnés. Avez-vous découvert des points communs ?
Nous avons beaucoup d’auteurs de chevet en commun. Cela m’a beaucoup touché. On retrouve Maurice Pons pour Les saisons, Jean-Pierre Martinet pour Jérôme, entre autres. Nous avons le goût de cette littérature qui a une dimension forte dans son immense fragilité.
On a beaucoup parlé de Camus. Qu’est-ce que l’on fait face à l’absurdité du monde ? , quelles sont les résistances possibles, avec toutes les erreurs, que commettent les résistances même modestes ? C’est tout le sens de la révolte chez Camus.
Dans le dossier de présentation, il y a ce mot de Denis Lavant dans lequel il écrit : Enfin un texte de théâtre ! Une redécouverte pour moi d’une possibilité d’aimer un théâtre contemporain, donc de désirer ardemment faire partie de cet événement, avènement si rare. Donc je remercie fraternellement Yann de m’apporter ce cadeau de théâtre et j’ai envie de faire mon possible pour soutenir cette entreprise effarante et salvatrice. Quelle a été votre réaction lorsque vous avez lu ces mots ?
Je suis en peine à en parler. C’est après de nombreuses rencontres autour du texte qu’il m’a écrit ce mot. Combien même ce spectacle ne pourrait se faire par manque de moyens de production, ce mot sera conservé pour me souvenir de ce jour-là. Le 18 juillet fera date pour moi.
Propos recueillis par Laurent Bourbousson
Visuel : Yann Karaquillo ©Thierry Laporte
Date et générique
L’Acte d’Amour (tragi-comédie à machines et musiques) , le 18 juillet, à 14h, au Théâtre des Carmes. Entrée libre. Réservations 04 90 82 20 47
Texte Yann Karaquillo | Avec Denis Lavant | Musique La Veuve électro. Laurent Rousseau (live).