[ITW] OFF19 : Guillaume Cantillon pour Métamorphoses

22 juillet 2019 /// Les interviews - OFF
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Découvrez un extrait de l’interview de Guillaume Cantillon – Le Cabinet de Curiosités, et retrouvez son intégralité dans la REVUE #5

C’est durant le Festival Off 2012, avec son adaptation de Dies Irae de Leonid Andreïev, présentée au Théâtre des Halles, que nous avions découvert le travail de Guillaume Cantillon. Avec sa compagnie, Le Cabinet de Curiosités, il pique celle du public à chacune de ses créations.

Métamorphoses

Qu’est-ce qui vous a poussé à exhumer, en quelque sorte, ce texte ?
Nous avions monté un spectacle avec la promo à l’ERACM. C’est un texte que j’ai adoré. Ce choix de le porter à la scène a refait surface à l’occasion de l’élection du Président Macron.

C’est surprenant comme motivation !
Oui. [rires.] Moi qui étais très passionné par la politique, la campagne présidentielle, l’élection et ce qui s’en suit, m’en ont complètement détourné, et ce même encore aujourd’hui. Je trouve que ces circonstances politiques ont vidé la substance du politique. Nous sommes dans l’ère de la communication et cela prend le dessus sur les vrais problèmes. J’avais besoin de me raccrocher à quelque chose de simple, qui parle de singularité, de petites histoires, tout en étant universel afin de revenir à des notions fondamentales que sont l’amour, la passion.
Si je réfléchis de façon plus poussée, il y a eu aussi cette idée de me dire que, même si le monde se transforme, il ne se transforme pas dans les actes, mais uniquement dans les discours et le positionnement. Le temps des métamorphoses nous est annoncé, mais il n’arrive pas. Avec ce texte, je traite de métamorphoses profondes, concrètes et violentes parfois.
Mais par-dessus tout, je voulais revenir à la poésie et quitter le texte théâtral. C’est une des missions que je me suis donnée. Et cette la langue de Gilber Lely est magnifique.

L’amour, la poésie, les mots, des moteurs de vie

Pensez-vous que la poésie peut nous pousser à la réflexion ?
Elle est un procédé encore plus direct pour parler aux âmes. L’écriture de Gilbert Lely est une poésie contemporaine qui s’appuie sur des écrits qui accompagnent le monde depuis des millénaires. Il y a quelque chose de gigantesque. La poésie est pour moi un moyen idéal pour parler d’aujourd’hui, pour parler à l’homme de sa condition, de la société et de nos questionnements existentiels.

Est-ce que l’amour pourrait nous sauver de tout ce marasme ?
Je pense que oui, car l’amour demande que l’on s’implique, que l’on s’engage et nous permet de nous sentir vivant, connecté aux autres et au monde. J’entends par amour les liens qui nous unissent. Donc, oui, il peut nous sauver, au contraire de la politique.

La musique de métamorphoses

Dans Métamorphoses, vous constituez un duo avec le musicien Vincent Hours. Comment avez-vous travaillé à la mise en scène ?
Du moment où j’ai décidé de travailler sur Métamorphoses, je me suis dit qu’il fallait que je pose une installation un peu plastique. Je voulais donner un écrin au texte. Assez vite, s’est posée la question de l’espace. Je voulais un espace dans lequel les mots puissent s’écrire et qu’il y ait une scène sur la scène afin de donner un piédestal aux mots. C’est pour cela que je me retrouve sur une passerelle qui brille, où il n’y a pas d’accessoire. C’est un espace vierge qui demande à être habité. Mais c’est l’endroit du show également.
Dans ma réflexion, la question de la performance est vite arrivée. Qu’est-ce que ce champ recouvre pour moi ? Ma réponse a été de chanter en public, chose qui me terrorise a priori et qui n’est pas mon mode d’expression. C’était l’occasion d’aller dans cette direction.
J’ai fait appel à Vincent, batteur de métier, qui allie son son à celui de l’électro. Je n’avais pas de couleur musicale précise en tête. Nous avons d’abord fait des sessions de travail tous les deux, avant que l’espace scénique arrive. Tout s’est placé simplement, je lisais des textes, lui accompagnait, faisait des compositions.
La musique dans ce spectacle a deux rôles, soit elle est accompagnement, soit elle est orchestration. J’ai choisi trois chansons qu’il a réorchestrées. Il les a intégrées à l’univers musical qui commençait à se dégager de notre travail.

La solitude du créateur

On vous retrouve seul à dire le texte de Gilbert Lely. Était-ce une volonté de couper avec des créations à plusieurs ?
Avant Métamorphoses, il y a eu Les inassouvis pour laquelle nous avions écrit à quatre. Il y avait une question de compromis. J’avais le besoin de revenir à une certaine solitude et puis j’ai une telle proximité avec ce texte que je n’avais pas envie de le confier à quelqu’un. C’est vraiment une forme de nécessité de se retrouver seul et de travailler seul.

Il faut réellement être amoureux du théâtre pour proposer un texte comme celui-ci ?
C’est un texte qu’il faut donner entièrement. C’est un monologue très adressé. Je souhaite que le public entende chaque mot, qu’il entende la beauté de l’écriture de Lely, la part esthétique de son travail et la profondeur de cet écrit qui nous traverse depuis des millénaires. C’est un texte extrêmement vivant. Il doit tomber dans chaque oreille.

Faut-il être amoureux du théâtre pour venir faire le festival d’Avignon ?
Je suis amoureux de mon spectacle en fait. [rires.] J’ai envie de le jouer, qu’il soit vu, qu’il continue d’exister. Je l’ai conçu pour qu’il s’adapte à des lieux différents. Nous l’avons déjà joué en salle, dans les théâtres, en plein air, en plein jour, dans des souterrains, des médiathèques… Le plateau est autonome en lumière. On a constaté qu’à travers toutes les formes, si on supprime des éléments, le spectacle se suffit à lui-même. À Arthéphile, nous présenterons une version plus légère que l’initiale. Avignon, c’est donner une chance au spectacle de tourner.

Métamorphoses en quelques mots

Guillaume Cantillon donne à entendre 6 merveilleuses métamorphoses de Gilbert Lely d’après Ovide. Chacune résonne face au chaos du monde que nous vivons. On questionne l’amour, la nature et la place de l’Homme.
Sur sa structure en verre, accompagné du batteur Vincent Hours, le comédien se fait chanteur le temps de trois chansons qui mettent en lumière la substance des récits initiatiques et ancestraux.
La poétique des Métamorphoses est d’une étrange douceur. Elle est ensorcelante pour les oreilles du public qui reste très à l’écoute.
Cette proposition est un moment qui invite à se poser pour réfléchir. Un théâtre comme on l’aime.

Propos recueillis par Laurent Bourbousson
Photo : Guillaume Cantillon ©Geoffrey Fages

Dates et générique

Métamorphoses au Théâtre Artéphile, tous les jours, du 5 au 27 juillet, à 21h
Interprétation Guillaume Cantillon, Vincent Hours | Régisseur son Zidane Boussouf | Régisseur lumière et vidéo Jean-Louis Floro

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