[VU] Elephant Man, mise en scène de David Bobée : ça passe ou ça casse

9 février 2020 /// Les retours
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Dernière (super)production du metteur en scène David Bobée, Elephant Man suscite des attentes certainement beaucoup trop grandes. Retour.

Après deux heures de spectacle, le public, venu assister en masse à l’une des représentations d’Elephant Man au Théâtre des Salins (Martigues), applaudira de manière nourri les comédiens de la dernière mise en scène de David Bobée, directeur du CDN de Normandie-Rouen. Certains se lèveront et d’autres se manifesteront de façon plus sporadique devant le naufrage théâtral auquel ils viennent d’assister. Et pourtant, tout avait de quoi séduire.

Elephant Man, l’affiche

En premier lieu, un couple placé au rang du mythe : JoeyStarr et Béatrice Dalle. À l’affiche pour la création, cette dernière a été remplacée par Sophie Caritté pour des raisons personnelles et familiales, si l’on s’en réfère au communiqué de presse. Dur labeur de remplacer une comédienne d’une telle stature. Malheureusement, l’esprit se posera la question tout au long du spectacle : qu’auraient été les dialogues entre Mme Kendal et John Merrick, si l’absente, qui tient une place si importante, était présente sur le plateau ?
Toutefois, Sophie Caritté n’est pas amoindrie dans son rôle et relève le défi convenablement face à un JoeyStarr qui hélas, et certainement que cela est dû à la direction des comédiens, semble être uniquement présent pour donner une illustration de son personnage sans réellement l’incarner. Seule la dernière scène permettra de ressentir ce qui a fait cruellement défaut durant les deux heures de spectacle.

L’histoire : domination, castes sociales…

En second lieu, l’histoire. La pièce de Bernard Pomerance s’inspire des mémoires du Docteur Frederick Treves, chirurgien, qui s’était intéressé au cas de John Merrick, personne atteinte du syndrome de Protée, en Angleterre sous l’ère victorienne, où il était montré comme bête de foire en raison de ses nombreuses malformations physiques. Forcément, tout un chacun a en son esprit le film mythique de David Lynch, sorti en 1980, ou bien, s’il a eu la chance de la voir, et cela j’en doute, la pièce à Broadway avec David Bowie dans le rôle titre.

Le fond de la pièce (maltraitance, domination, altérité, castes sociales, voyeurisme…) a en effet de quoi trouver une résonance avec nos problématiques contemporaines. En adaptant le texte initial, Pascal Collin et David Bobée situent toujours l’action en 1884, en y mêlant des objets d’aujourd’hui et en questionnant le théâtre de nos vies (entre rêve, onirisme et réalité). Ils ne font qu’approcher de façon assez éloignée une réflexion qui s’évapore aussitôt ou qui se retrouve perdu dans le flot de paroles.

11 comédiens au plateau

Enfin, la distribution réunissant 11 comédiennes et comédiens avait de quoi promettre. Au final, ce sont des interprétations désincarnées qui se succèdent sur le plateau. La parole devient cri à chaque réplique. Entrecoupées de vidéos et de musique, les scènes s’enchaînent sans trouver de réelles intentions. Le temps s’étire et laisse s’imprimer, heureusement, de belles images (le bain de John Merrick, l’apparition des fantômes de ce dernier, les éléments d’une cathédrale en construction éparpillés sur le plateau…) qui nous feront dire que l’on aurait aimer aimer cette (super)production, mais qu’il n’en est rien.

Vivement la prochaine création David Bobée.

Laurent Bourbousson
Visuel : JoeyStarr dans Elephant Man ©Arnaud Bettereau

Générique

Elephant Man a été vu au Théâtre Les Salins – Scène Nationale de Martigues.
Traduction et adaptation Pascal Collin David Bobée |Interprétation JoeyStarr (John Merrick) Sophie Caritté (Madame Kendal) Christophe Grégoire (Docteur Frédéric Treves) Michael Cohen (Ross) Clémence Ardoin (Miss Mina Shelley) Gregori Miège (F.C. Car Gomm) XiaoYi Liu (Princesse) Radouan Leflahi (Snork) Papythio Matoudidi (Will) Luc Bruyère (Jack Webster) Arnaud Chéron (L’homme) |Directeur technique Thierry Kana Dumont |Conception lumière Stéphane Babi Aubert |Conception vidéo Wojtek Doroszuk |Conception sonore Jean-Noël Françoise | Scénographie Aurélie Lemaignen, David Bobée |Assistante à la mise en scène Sophie Colleu

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