[VU OFF23] Not I de Camille Mutel débute la journée en douceur
Avec Not I, la chorégraphe Camille Mutel offre un moment de grâce et méditatif dans le Cloître de l’Université d’Avignon. Un temps suspendu pour bien débuter la journée.
Au dehors, les coups de klaxons et les bruits des moteurs se font entendre lorsque le public pénètre dans le Cloître de l’Université d’Avignon. À l’abri du quotidien, derrière les murs épais, va se jouer d’ici quelques minutes une cérémonie à laquelle Camille Mutel convie les spectatrices et spectateurs de bonne heure, à 9h15 pour être précis.
La chaleur ne se fait pas encore ressentir. Quelques piaillements d’oiseaux se font entendre. Nous sommes rassemblés derrière les murs épais du cloître. La cérémonie peut débuter.
Not I, une cérémonie de l’éloge du temps présent
Camille Mutel offre avec Not I un cérémonial à partager. La cérémonie de thé convoquée devient celle du vivant, du temps, de la tension et de la méditation.
C’est avec précision que les gestes sont exécutés. Ils agissent tels des loupes sur l’insignifiant qui devient d’une importance inouïe. Ils transmettent de réels moments de tension comme lorsque la chorégraphe, couteau à la bouche, dépose l’ustensile perpendiculairement au sol.
Le souffle se tasse, le regard est hypnotisé. Le bruit du dehors si présent au début se fait lointain et laisse place à l’univers sonore de Jean-Philippe Gross. Le corps accueille cette cérémonie avec délectation.
Not I sera ressenti différemment par chaque personne du public. La chorégraphe invite votre moi profond à se confronter à la lenteur, à un temps distendu qui bouleverse la perception et qui implique, pour une fois, de s’octroyer une pause bien réelle.
Laurent Bourbousson
Crédit photo : ©Katherine Longly
Camille Mutel en interview
Découvrez ci-dessous, un extrait de l’interview que nous a accordé Camille Mutel
Cet été, vous présentez Not I dans le cadre de la programmation du Théâtre du Train Bleu au Cloître de l’Université d’Avignon. Ce spectacle est le premier d’une quadrilogie intitulée « La place de l’autre ». Il me semble que cette place de l’autre est questionnée depuis le début de vos créations ?
L’autre, c’est-à-dire le spectateur, est vraiment au centre de cette quadrilogie. Le spectacle, je le fais pour l’autre et je questionne le principe de cette offrande. Not I est une cérémonie du thé qui interroge l’intériorité japonaise, de savoir ce que signifie offrir un thé, à boire, offrir un geste, un spectacle. Qu’est-ce que l’on offre réellement ? Pour répondre d’une façon simple, on offre du temps en fait, on s’offre du temps ensemble.
Not I existe en version intérieure et extérieure. On imagine que ce sont deux choses bien différentes.
Nous avons fait Not I une seule fois en extérieur et c’était en 2021. Nous l’avions créé pour un jardin remarquable en Lorraine. La version intérieure existe depuis 2020.
Effectivement, le public n’est pas le même et il n’a pas les mêmes attentes si l’on est programmé au Théâtre de la Ville, sur une scène nationale ou bien en extérieur. Lorsque nous l’avons proposé In situ en 2021, nous avons joué devant un public qui venait visiter le jardin avant toute chose. Nous avions 40 spectateurs par représentation. Le public est autour de nous, à proximité. Toute la faune et la flore du jardin accompagnaient notre spectacle. Not I s’inscrit dans un paysage devant lequel on est en contemplation. Le spectacle devient plus humble dans sa version extérieure, il est au service d’un paysage et nous tentons de le magnifier. Sa version intérieure est différente puisque nous avons une certaine mainmise sur ce qui se passe sur le plateau.
Retrouvez l’intégralité de l’interview dans la Revue #8 d’Ouvert aux publics : Penser le monde autrement
Générique
Conception, chorégraphie, danse : Camille Mutel / Dramaturgie : Thomas Schaupp / Costumes : KASPERSOPHIE / Travail sonore : Jean-Philippe Gross / Régie générale : Gildas Goujet