#FDA18 : Kreatur de Sasha Waltz, quand la beauté plastique ne sauve pas tout

13 juillet 2018 /// IN - Les retours
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D’une beauté plastique intense, la chorégraphe allemande signe avec Kreatur une pièce politique qui ennuie à force de démonstrations. Retour.

En trois tableaux et 1h35, Sasha Waltz signe avec Kreatur ce qui aurait pu être une diatribe de notre société mais échoue, malheureusement.
Les corps des danseurs, nombreux au plateau, laissent entrevoir un champ des possibles, celui de raconter nos tragédies passées, contemporaines et futures.
C’est dans leurs enveloppes contonneuses que les interprètes apparraissent aux yeux du public. Ils naissent, sont des embryons qui se font et se défont. Une humanité en route pour une vie terrestre qui lui réserve le pire comme le meilleur. Ce premier tableau, d’un onirisme profond, perd de sa superbe sur sa longueur.

Kreatur ©Christophe Raynaud de Lage

On danse la peur, la fuite, la difficulté d’avancer chez Sasha Waltz. Une grande feuille de papier transparent aux sons métalliques, lorsqu’elle est agitée, vient couvrir les corps des danseurs. La déformation des corps et la multiplication de ces derniers par les effets de la matière renvoient aux corps torturés par les guerres. La fuite sur un escalier blanc à cour devient primordiale pour cette humanité qui en appelle à sa survie. Cette image est le catalyseur d’une actualité brûlante, celle des bateaux sur lesquels s’empillent les immigrés dont l’Europe refuse tout accostage.

La terreur, la maladie, l’insécurité et la peur d’être témoignent de l’atmosphère politique et sociale dans laquelle les danseurs évoluent. Leurs corps ne sont jamais en paix. Toujours en fuite ou sur la réserve, on souhaiterait les voir moins humains pour moins souffrir parfois. Sasha Waltz depeint notre sombre époque où le tout devient oppressant. La musique de Soundwalk Collective souligne comme il se doit la rudesse du propos.

Kreatur ©Christophe Raynaud de Lage

Le tableau de la dictature finalisera une démonstration un peu trop appuyée sur les dérives tortionnaires que l’humain continue d’exercer. Cela aurait eu le mérite de toucher le public qui passe, pour la plupart de son temps, à côté des intentions de la chorégraphe.
Cependant, les 14 danseurs sont plus forts lorsque les mouvements de groupe se font. Un sentiment de partage éclaire ces ensembles.

Si l’ultime scène fait résonner la chanson du duo Birkin/Gainsbourg, que penser de ce Je t’aime moi non plus, si ce n’est qu’il arrive comme un cheveu sur la soupe. Dommage.

Laurent Bourbousson
Crédits photos : Christophe Raynaud de Lage

Kreatur, jusqu’au 14 juillet, à 18h à l’Opéra Confluences. Renseignements ici.
Chorégraphie Sasha Waltz | Interprètes Liza Alpízar Aguilar, Jirí Bartovanec, Davide Camplani, Clémentine Deluy, Peggy Grelat-Dupont, Hwanhee Hwang, Annapaola Leso, Nicola Mascia, Thusnelda Mercy, Virgis Puodziunas, Zaratiana Randrianantenaina, Yael Schnell, Corey Scott-Gilbert, Claudia de Serpa Soares | Collaboration artistique Davide Di Pretoro | Costumes Iris van Herpen | Lumière Urs Schönebaum | Son Soundwalk Collective | Dramaturgie Jochen Sandig

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