[ITW] Gaël Leveugle, magnétique dans les lettres d’amour de la religieuse portugaise
La compagnie Ultima Necat offre au public avignonnais une pièce magnétique et hypnotique. C’est à la caserne des Pompiers jusqu’au 26 juillet. Retour et interview.
Lettres d’amour, la découverte du texte
Devenu un texte de référence au fil du temps, il fallait un interprète à la hauteur de l’enjeu afin de rendre les mots vivants et audibles comme ils se devaient de l’être. C’est à Gaël Leveugle de la compagnie Ultima Necat de se glisser non pas dans la peau mais dans les mots de ces « Lettres d’amour de la religieuse portugaise ».
Ecrites à la fin du XVIIe siècle, ces lettres racontent la passion pour une tragédie à venir, celle de se consummer par amour. Si elles rencontrèrent un réel succès, leurs authenticités leur donnèrent tout le mystère qui les accompagnent encore aujourd’hui.
Sont-elles l’œuvre de Gabriel de Guilleragues ou bien de cette religieuse portugaise qui brûle d’amour au fond de son cloître pour cet officier français ?
Les mots sont d’une épaisseur certaine. Ils sont la démonstration d’une intensité de vivre au travers, par et au-delà la passion. La mise en scène proposée ici met en lumière le mouvement de cette passion.
Gaël Leveugle, de la parole au fracas
Gaël Leveugle est présent sur le plateau lorsque le public entre en salle. Il attend dans la pénombre, se maquillant les lèvres de rouge. Pieds nus, il chaussera des chaussures talons d’un rouge vif, témoin de la passion qu’il va dire.
Prenant possession de l’espace à cour, il partage son espace de jeu avec un mur de glace. Les néons en fond de scène viennent rythmés les séquences des missives lues et la lumière vient effleurer de ses rayons ce mur de glace sensoriel qui fond comme l’être qui se consume d’amour.
Le clapotis de l’eau accompagne la voix si particulière de Gaël Leveugle. Sa voix transporte le public et l’abonde de mots d’amour, de douleur et de liberté retrouvée dans l’état insupportable d’abandon.
Le fracas de la glace qui se détache du mur accompagne les mots de la perte d’un corps aimé. L’eau se répand sur scène, offrant un miroir dans lequel se reflète la douleur libérée. On se retrouve alors dans l’état que nous avait laissé la Loretta Strong de Copi, que nous avions vu en 2016, devant tous les possibles que peut s’offrir un acteur au plateau.
Avec « Les lettres d’amour de la religieuse portugaise », Gaël Leveugle signe une proposition hypnotique et magnétique, poussant un peu plus loin l’expérience pour lui-même et son public.
L’interview
Laurent Bourbousson
Visuel : Gaël Leveugle ©Frédéric Toussaint
Générique
Auteur : Gabriel de Guilleragues / Mise en scène et interpretation : Gaël Leveugle / Coord. artistique : L. Cerclé / Travail sonore : J-P. Gross / Lumière et vidéo : F. Toussaint