[ITW] On fait connaissance avec la compagnie Le Scribe
Maëlle Deral et Adel El Shafey sont les nouveaux artistes associés au Théâtre Golovine pour la saison 19/20. Ils ont créé leur compagnie Le Scribe en 2015. Nous avons souhaité faire leur connaissance avant la soirée Hip-Hop du 22 novembre, qui se déroulera au Golovine. Rencontre.
Deux individus avec leur singularité qui se complètent hautement, telle pourrait être la définition que l’on pourrait donner à la direction de la compagnie Le Scribe. Maëlle Deral et Adel El Shafey sont cela. Chacun a développé son propre vocabulaire et sa propre physicalité avant de se rencontrer. Récit de notre première entrevue, le premier d’une série.
Deux parcours, deux sensibilités
C’est en courant que j’arrive à notre rendez-vous. Je les découvre, discutant avec Yourik Golovine, directeur du Théâtre Golovine, lieu pour lequel ils sont associés pour cette saison. Après de plates excuses pour mon retard, nous nous installons au bar du théâtre et entamons notre discussion.
En guise d’introduction, je leur demande de se présenter et ce qui me surprend est leur arrivée respective à la danse. Enfant, c’est vers la natation que se dirige Maëlle. Elle la pratique à un haut niveau jusqu’à ses 15 ans. La solitude des couloirs des piscines l’emmène à suivre une amie à un cours de danse. « Ça m’a plu tout de suite. Ce qui m’a intéressé c’était le côté recherche. Avec Les ballets contemporains de Saint Étienne, dirigés par Mireille Barlet, j’ai signé un engagement de 2 ans. Durant tout ce temps, les élèves participent à une création. On suit des cours et on poursuit la recherche du mouvement. Ceci m’a poussé à continuer plus loin et j’ai suivi la formation Coline (Istres). » Après cette formation professionnelle, Maëlle commence à travailler avec des compagnies.
Pour Adel, c’est la pratique des arts martiaux, dans lesquels la musicalité des mouvements est importante, qui l’occupe de 10 à 15 ans. « À 15 ans, j’ai tout arrêté avec l’idée de créer quelque chose, de bouger. Ça a mûri et après le bac, à 18 ans, je me suis retrouvé à faire du hip-hop, dans la rue, avec un groupe de copains. C’était début 2000, et les cours de hip-hop n’étaient vraiment développés. Ensuite, je me suis retrouvé à faire des battles. Même si j’allais voir des spectacles de danse contemporaine, je n’ai jamais été intéressé, étant adolescent, pour suivre une formation de base classique ou de danse contemporaine. Je voulais créer quelque chose en danse hip hop, sans avoir de maîtres à côté de moi ».
Adel se retrouve à faire partie de la distribution de la pièce No(s) Limite(s) de la compagnie Alexandra N’Possee, en 2008. Il poursuivra avec cette compagnie et sera interprète pour d’autres chorégraphes. Mais le désir de créer devient de plus en plus fort. « En 2013, je travaillais avec beaucoup de compagnies. J’ai fait un break car de travailler pour d’autres ne me convenait plus. De 2015 à 2017, je me suis réellement nourri et ai suivi des cours. Je me suis dirigé vers la danse contemporaine. J’avais besoin d’aller chercher des outils dans diverses disciplines, comme le théâtre ».
Interprètes-chorégraphes
Et c’est cette question de nourriture qui lie ces deux interprètes-chorégraphes. Pour Maëlle, qui travaille, entre autres, avec Gilles Jobin ou encore Eric Minh Cuong Castaing, il est important de garder cette double casquette. « En sortant de formation, on m’avait donné les outils nécessaires. Je me suis posée la question de savoir ce que je pouvais faire de tout ça. Du coup, je me suis mis à rechercher d’autres outils pour développer ma danse ».
La rencontre entre les deux interprètes se fait à Lyon, en 2012, dans des entraînements de danse contemporaine. Des affinités artistiques voient le jour.
Ils travaillent ensemble sur le projet La marche de la compagnie Second souffle. il faut dire qu’avec leur arrivée sur Lyon, une certaine émulsion artistique se fait sentir. Arts plastiques, théâtre, et même danse classique pour Adel, font que leurs échanges se nourrissent d’une multitude de nouveaux outils. De paroles en paroles, ils décident de se lancer, ensemble, dans la création de leur compagnie.
La compagnie Le Scribe
En 2014, la compagnie Le Scribe voit donc le jour pour les besoins de la création de leur premier spectacle, qui sera repris le 22 novembre prochain au Théâtre Golovine. « Je me suis aperçu que j’avais besoin de passer par un solo pour poser certaines choses, nous explique Adel. C’est là que Maëlle est intervenue. J’avais besoin d’un regard extérieur. En termes de vision, certaines choses coïncidaient. On a senti qu’il fallait que l’on fasse quelque chose ensemble ». « Avant Logos, Adel écrivait. Il avait d’ailleurs créé une compagnie qui n’existait qu’administrativement parlant » renchérit Maëlle.
Logos, leur première création
Chemin faisant, Logos est créé l’année d’après. Adel et Maëlle regardent cette création avec sincérité. « Si la trame est la même qu’à sa création, Logos est beaucoup plus rempli aujourd’hui, même si nous l’avons épuré », indique Maëlle. « Logos a évolué en terme d’intentions et de rythmiques », nous explique Adel. « Et depuis notre rencontre, nous avons évolué chacun, à la fois dans notre matière et dans notre façon de travailler » conclu Maëlle.
Abysses, nouvelle création pour juillet 2020
Artistes associés au Théâtre Golovine, ils créeront Abysses lors du prochain festival Off d’Avignon. À la question de savoir comment ils travaillent en studio, ils répondent en chœur : « on parle beaucoup et nous sommes dans l’action. Nous sommes dans la recherche. On part d’une matière, on supprime des éléments afin d’être le plus direct possible, pour que le geste se suffise à lui-même. On travaille sur la recherche de contrastes et de mises en valeur de ces éléments. La vidéo nous aide beaucoup. Nous nous filmons et c’est un va-et-vient permanent que nous faisons entre le plateau, endroit des tentatives, et l’écran. Nous ne sommes pas tendres l’un envers l’autre. On reste le plus objectif possible ».
Tout est question d’équilibre chez Maëlle et Adel. L’un comme l’autre se lancent dans un travail qui répond à leurs attentes les plus profondes. Actuellement, il s’agit de cette seconde création. Ils seront en résidence au Théâtre Golovine courant novembre. Le rendez-vous est pris afin d’évoquer Abysses et de poursuivre notre échange.
Propos recueillis par Laurent Bourbousson.
Visuel : William Chareyre
Générique et date
Retrouvez Adel El Shafey pour le Mardiff, au Théâtre Golovine, du 19 novembre 2019 à 19h30.
Logos sera présenté le vendredi 22 novembre à 20h, lors de la Soirée Hip-Hop – Plateau partagé avec la Cie Tenseï – Rafaël Smadja.
Le blog Ouvert aux publics est partenaire du Théâtre Golovine.