Les têtes à clap

28 juin 2014 /// Les interviews
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Passion et transmission font battre le cœur des Têtes à Clap. Coup de projecteur sur le travail de cette association et de son président Ludovic Duplissy, à l’occasion du 7ème festival de cinéma qui se tiendra à Tarascon et Beaucaire du 4 au 6 juillet.

Mais qui est donc Ludovic Duplissy ?
Je suis professeur des écoles et directeur à l’école élémentaire Puech Cabrier à Beaucaire, depuis cette année. Que dire d’autres, que je suis passionné par le cinéma et que je suis le président de l’association Les têtes à clap.

Comment est née cette passion ?
Je passais mes vacances avec mon grand-père aux Saintes-Maries de la mer. Il y avait un cinéma et tous les soirs, mon grand-père nous amenait, mon frère et moi, voir les films de l’année écoulée. Il y a avait la programmation annuelle sur 2 mois. Parfois, on faisait les deux séances, celle de 20h et celle de 22h. Mon grand-père m’a donné ce goût pour le cinéma. Il aimait nous faire découvrir des films, c’était un véritable plaisir pour lui et pour nous.

L’ASSOCIATION

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Ci-contre : Membres de l’association et public avec l’équipe du film Les Petits princes 

Quelle est l’histoire de la création de l’association Les têtes à clap ?
L’association est née par nécessité, grâce au dispositif Ecole et cinéma de l’Education nationale. Ce dispositif consiste à montrer aux enfants des classes maternelles et primaires des films qu’ils n’iraient pas forcément voir avec leurs parents. Ce peut être des films à succès mais ce n’est pas le premier but. L’objectif étant vraiment la découverte des films du patrimoine du cinéma. Pour nous, habitants de Beaucaire, la seule possibilité pour participer à ce dispositif était d’aller à Nîmes, à 30kms d’ici, donc de louer un car, ce qui est hors de prix pour une école… Nous avons réfléchi avec des collègues enseignants et avons décidé de faire venir le cinéma à Beaucaire et donc de créer l’association pour assurer la gestion financière de ce dispositif. Entre temps, nous avons créé un partenariat avec le festival Itinérances d’Alès. On travaille avec Catherine Augé, de la section jeune public de ce festival. On fait une sélection de films avec elle. Au début, seulement 3 écoles beaucairoises participaient au festival. Ensuite, les établissements environnants en ont pris connaissance et nous ont demandé à participer. Maintenant, le festival s’étend aux villages autour de Beaucaire et même dans les Bouches-du-Rhône – sourires.

Comment se construit un tel festival ?
Le calendrier est très serré, car dès la rentrée scolaire, Catherine Augé m’envoie une sélection de films qu’elle a vue dans des festivals l’année précédente. Je récupère et je visionne tous les films. Ensuite, je lui fais ma liste beaucairoise pour sa décentralisation. En novembre/décembre, on envoie la sélection dans les écoles. Les enseignants choisissent les films qu’ils désirent voir, grâce à une sorte de mallette pédagogique avec mes conseils. En janvier/février, les enseignants reçoivent leur planning et dès la rentrée des classes des vacances d’hiver, on attaque les projections. En ce moment, on réfléchit beaucoup au festival de l’année prochaine car avec les fameux TAP (temps d’activités périscolaires), cela va nous amputer les après-midi et du coup le festival sera beaucoup plus long, ne pouvant se dérouler qu’en matinée.

En termes de fréquentation, que représentent ces projections ?
Les écoles beaucairoises, publiques et privées, participent à 100%. Nous sommes fiers à l’association car nous sommes arrivés à ce que 100% des écoliers beaucairois aillent au moins une ou deux fois au cinéma par an. Il y a Comps, Fontvieille, Saint-Étienne du grès, Tarascon… Sur quinze jours, le festival fait 5 à 6000 entrées… Ce travail n’est pas connu mais c’est un travail de fond et qui me tient à cœur. Ce festival est très important pour l’association.

Tu réussis à allier vie professionnelle et l’affection particulière que tu portes au cinéma…
Oui, c’est tout à fait cela. Lorsque j’accueille les élèves aux projections, et je le fais le plus souvent possible, je me positionne en tant que passeur d’images. J’aime bien ce terme… Je leur donne des conseils pour être un bon spectateur. Je leur fait prendre conscience qu’ils sont dans un lieu public, avec des gens autour d’eux, qu’il existe des règles dans ce lieu, un peu comme à l’école, et que ces règles sont très simples : j’ai le droit de rire, de pleurer, d’avoir peur, par contre je n’ai pas le droit de parler car je vais gêner mon voisin, je n’ai pas le droit de trop bouger, je vais aux toilettes si c’est pressé… Tout ça contribue à former des enfants qui iront au cinéma pour aller voir un film.
Et je leur conseille, au cas où le film ne leur plaît pas, car ils peuvent ne pas aimer du tout et cela je peux le comprendre, je leur conseille de dormir car ça, ils peuvent le faire. Rires. Et je leur présente le film en fonction de leur âge. J’adopte mon discours aux enfants qui se trouvent devant moi.

LE FESTIVAL D’ETE

Omar Sy et Youssef Hajdi – Festival de Beaucaire (ci-contre)Omar et Youss

Comment en êtes-vous venu à créer le festival d’été ?
Il y a 7 ans, la ville de Beaucaire, qui nous subventionnait pour le festival scolaire, nous a demandé de monter un petit festival à l’occasion des estivales dont le thème était Beaucaire fait son cinéma. Le bureau a été séduit par la proposition. Ma formation acquise sur le festival Un réalisateur dans la ville, à Nîmes, autour de projections en plein air et des circuits pour demander les films, me permettait d’assurer la tenue du festival. Donc, nous avons dit oui mais il fallait trouver un invité-parrain du festival. A cette époque là, j’étais jury à Alès du concours Ecrit sur images (collégiens et lycéens visionnent un film inconnu et doivent restituer une critique). Claude Grimberg, réalisateur de télévision, faisait parti du jury. Et je lui demande si il connaît quelqu’un pour être le parrain du festival. Il décroche son téléphone et appelle David Soul devant moi. Il lui donne mon adresse mail et le soir même je recevais un mail de David Soul. Ça s’est fait naturellement.

Effectivement, c’est tout naturel. Rires. Pour les autres invités, cela s’est passé comment ?
Pour la 2ème année, nous avons accueilli Mathieu Simonet, Bernard Blancan, pour le film Indigènes, Youssef Hajdi pour 13m2 et Eric Blanc. Suite à sa venue, Youssef devient parrain du festival et de l’association à vie, car en tant que beaucairois, cela nous a semblé normal. Et surtout, il adhère totalement à ce pourquoi l’association existe.
Mathieu Simonet, avec lequel nous avons sympathisé, nous demande de l’aide pour rencontrer des personnes à la région Languedoc Roussillon pour la réalisation de son film Prunelle et Mélodie. Connaissant un peu de monde, je lui décroche un rendez-vous et le film se fait. Pour la 3ème année du festival, j’appelle Matthieu et lui demande si son père, Jacques Perrin, veut bien être l’invité, il accepte et on présente Océans.
Pour le 4ème festival, Youssef qui a un petit rôle dans Micmacs à tire-larigot demande à son réalisateur, Jean-Pierre Jeunet, si il veut bien venir au festival. Et ça marche. Sur le tournage, Youssef se lie d’amitié avec Omar Sy. Il demande aussi à Omar si il veut venir, mais retenu sur d’autres projets, il ne peut pas.
Omar Sy sera l’invité lors du 5ème festival et l’année dernière, nous avons eu l’honneur d’accueillir Leïla Bekhti. Et cette année, Elie Semoun…

Ça a l’air simple dit comme ça ?
Mais parce que c’est simple. Les artistes viennent en toute amitié, c’est juste un échange. On vit vraiment ensemble le temps du festival. Les artistes regardent les films réellement et on propose une véritable rencontre. Il y a un temps d’échange, durant le festival, auquel je tiens vraiment. Cet échange est animé par les élèves du Lycée Philippe Lamour de Nîmes. Il y a toujours ce lien avec le scolaire qui nous paraît essentiel et qui est essentiel.

Et comment s’est construite la programmation cette année ?
Elie Semoun avait une seule volonté, celle de programmer Les Parasites. Avec l’association, on a cherché des films dans lesquels Elie Semoun a le rôle principal. Il y en a : les deux Ducobu et Cyprien. On a monté un festival très familial. J’espère que le public sera au rendez-vous.

LES PROJECTIONS RENCONTRES

Mais le travail de l’association ne s’arrête pas là car il y a les fameuses projections-rencontres …

To the mairie
Ci-contre : Téléthon 2012. ©DAVIDBASCUNANA

Oui, lorsque nos finances nous le permettent car cela coûte entre 1000 et 2000 euros. Le but est de présenter un film de l’invité. Cette idée des projections-rencontres est née lorsque nous avons participé au Téléthon. Il y a 4 ans, on diffuse Les enfants de TImpelback de Nicolas Barry. On l’invite, il vient avec son amie de l’époque, Alice Pol. Nous avons sympathisé avec elle. Nous la faisons venir pour le film Un plan parfait. Et lorsque nous avons fait cette année la projection rencontre autour de Supercondriaque, Alice Pol était présente, malgré une tournée promo de 250 dates et la fatigue, par fidélité et amitié. Nous avons rempli les deux salles de projection du cinéma de Tarascon, le jour de la sortie du film. On mise sur des jeunes talents pour ces rencontres.

SCOOP

La dernière projection rencontre était Les Petits princes. Paul Bartel, qui a le rôle principal, est venu avec Ahmed Dramé. A la suite de la rencontre, nous avons discuté et Ahmed me parle d’un film qu’il vient de tourner et qui lui tient à cœur. Et là, coup de téléphone d’Ahmed pas plus tard que la semaine dernière. Il me propose de venir en octobre avec le film Les héritiers de Marie-Castille Mention Schaar. Ce film raconte l’histoire d’Ahmed. Donc, une partie de l’équipe du film viendra le présenter au cinéma de Tarascon au moment de sa sortie, en octobre. Ça, c’est un scoop !

Avant le clap de fin, un petit mot sur votre arrivée à Tarascon…
Ce fut une décision pas très simple à prendre. Pour nous, il était clair et net que l’étiquette FN de la ville n’entrait pas en écho avec tout ce que nous avions fait et créé jusqu’alors. L’étiquette même est en opposition avec nos idées. On respecte le choix démocratique. L’association représente notre loisir et nous n’avions pas envie de travailler avec des personnes qui adhérent à un parti qui représente l’antithèse de ce que nous défendons. C’est juste cela. Nous n’avons rien contre les personnes, et nous n’avons pas non plus envie de travailler avec eux. Et aussi se pose la question de savoir quel artiste serait venu au festival si nous étions restés à Beaucaire ? On aurait pu aussi prendre la subvention et ne pas inviter la municipalité, mais cela n’aurait pas était dans les règles que nous nous sommes fixés. Donc, nous avons décidé de ne pas prendre la subvention pour le festival d’été que la mairie voulait nous attribuer. Avec cette position, je pense garder mon intégrité, je dors bien, je me regarde dans ma glace tous les matins et je suis bien.

Interview réalisé le vendredi 13 juin.

Le programme du festival :
Ouverture du festival, le vendredi 4 juillet 20h30 au Théâtre de Tarascon avec L’élève Ducobu, le samedi 16h00 au Quai des arts à Beaucaire, Les parasites, à 20h30, projection du téléfilm La dernière échappée, dans lequel joue Youssef Hadji, le dimanche à 16h00 au Théâtre de Tarascon, la discussion avec Elie Semoun, suivie de la projection de Cyprien. A 20h30 au quartier kilmaine – Tarascon, projection de Les vacances de Ducobu.
Le Pass festival : 15 euros. Les séances à l’unité : 5 euros.
Réservations : 07 7042 69 98
Internet : https://www.weezevent.com/7eme-festival-de-cinema-tarascon-beaucaire-les-45-et-6-juillet-2014-les-tetes-a-clap
Le site de l’association : http://www.lestetesaclap.fr/

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