[ITW] SØUVENIR : le beau groupe qui nous arrive
Francis Braun, collaborateur à Ouvert aux publics, nous a fait découvrir ce nouveau groupe, naît à travers leur chaîne YouTube. Après l’écoute des différents titres, merveilleusement clippés au cours d’une live session, et de leur live stream bien mené, nous avons envoyé nos questions pour faire connaissance. Et c’est depuis Saint-Martin-de-Belleville en Savoie, lieu d’une résidence d’écriture, que SØUVENIR a pris le temps de répondre.
Chloé Antoniotti, Pierre-Yves Duguey, Antoine Roux et Jules Teinturier forment ce nouveau groupe au doux nom. À travers leurs réponses, ils racontent les débuts de leur groupe, puisent dans leur propre souvenir, racontent leur désir et leur volonté de se faire une place dans le monde de la musique d’aujourd’hui.
On attend avec impatience leur nouvelle live session, Contemple, qui sera à découvrir sur leur chaîne YouTube le 9 mai.
SØUVENIR, les origines
Définir le style SØUVENIR, ce serait d’abord parler de la voix singulière de Jules Teinturier, reconnaissable entre 1000. Ce serait également parler des compositions et de l’atmosphère qui se dégage de celles-ci. À qui l’on doit votre formation ? Quels sont vos parcours ?
Jules Teinturier : Pour répondre à cette question, il faut que je commence par mon approche de la musique. J’ai pris des cours de guitare quand j’avais 13 ans, parce que je voulais imité un ami qui débutait la guitare. Avant cela, j’avais commencé à écrire de la poésie et au bout d’une année de cours de guitare, je me suis dit que ce serait cool de composer des chansons, tout en regardant Julien Doré à la Nouvelle Star. Il y avait cette envie d’aller sur scène qui était là.
J’ai absolument voulu passer sur scène. C’est à 14 ans que j’ai joué mes premières chansons devant des gens. Mes premiers textes étaient un cri d’envie d’exister, de dire des choses pas forcément très adroites. Ma première chanson parlait de l’homosexualité, genre comment on en parlait dans les cours d’école, à quel point c’était tabou et en même temps comment c’était évoqué à chaque récré.
Puis après, il y a eu des groupes de collèges, de lycées, et l’envie de vouloir jouer avec ses amis. Ça part juste de ça. Puis, ça a continué jusqu’à l’université sans véritablement avoir envie de devenir professionnel. C’était juste un rêve que tu as envie d’accomplir, celui d’être un chanteur et de jouer toute ta vie de la musique.
J’ai voulu assumer ce rêve et à 23 ans, j’ai fait le Cours Florent Musique en espérant rencontrer des musiciens qui avaient le même rêve. Et c’est là que j’ai rencontré Antoine.
Antoine Roux : J’ai le même rapport à la musique que Jules. Outre le fait que l’on m’ait forcé à faire du piano et du solfège à 6 ans, j’ai commencé la guitare à 11. À la base, ce qui me plaisait, c’était d’avoir un groupe de lycée. J’ai poursuivi mes études et je me suis rendu compte qu’à 22-23 ans ce que je faisais ne m’intéressait pas vraiment. La musique est revenue rapidement dans mon parcours. J’avais l’idée de retrouver ce plaisir de jouer avec d’autres musiciens.
Pierre-Yves Duguey : Au départ du projet, il y a les chansons de Jules du projet Jules Teinturier qui regroupait Antoine et Chloé. Nous nous connaissions car j’ai également fait le Cours Florent Musique. J’avais envie de rejoindre un groupe et lors du premier confinement, je me suis retrouvé avec Chloé et Antoine. Nous étions confinés à 3 et à la sortie de cette période, j’ai rejoint ce qui allait devenir SØUVENIR. Cette envie d’être ensemble est très forte chez nous.
J. T. : Nous sommes animés par une ambition débordante de vouloir vivre quelque chose de fort ensemble.
P.-Y. D. : Et pour revenir à nos parcours, Jules est plus chanson française avec des trucs un peu groovy à la OutKast, Prince ; Antoine est dans la tradi rock Têtes Raides ; Chloé passe du classique au jazz avec un peu de soul ; et moi, je suis rock électro. On vient tous d’un univers différent du rapport à nos régions. Julien vient des Sables d’Olonne, Antoine, de Carcassonne ; Chloé, de Savoie et moi, de Bordeaux. Nous tentons de faire transparaître dans nos chansons qui nous sommes.
La méthode SØUVENIR
Est-ce que cette complémentarité (Chloé Antoniotti au piano et synthé, Pierre-Yves Duguey à la guitare, Antoine Roux multi-instrumentiste et Jules Teinturier au chant) vous permet de composer tous ensemble les titres ? Jules, vous êtes à l’écriture, comment proposez-vous les textes des chansons aux autres membres ?
J.T. : Comme on le disait, les premières chansons sont mes textes. Pour mes influences, j’ai énormément écouté étant jeune des chansons françaises et du funky. Prince avec mon père, et côté chanson française, Mathieu Boogaerts, Alain Souchon, Vincent Delerme, Renaud même, des chanteurs où on peut entendre vraiment les textes. C’est ce qui était important pour moi et c’est pour cette raison que l’écriture prend encore plus d’importance à chaque fois. Je pense que c’est un mélange de beaucoup d’influences qui fait SØUVENIR. On a tous envie de se faire découvrir énormément de choses et de mêler nos influences.
Pour mes premiers titres, c’est plus un sentiment qui m’est venu, ce qui explique que les chansons soient lentes, où l’harmonie se pose avec des accords pleins. Peut-être que ces titres étaient nourris par le sentiment de solitude mais qui a changé au fil du temps. Je suis de toute façon mélancolique.
A.R. : Composer à 4 est quelque chose que l’on expérimente aujourd’hui. Pour moi, c’est quelque chose que je ne connaissais pas parce que je n’avais que des groupes de reprises avant. Ça peut amener à des titres beaucoup plus enlevés, beaucoup plus rythmés sur lesquels le plaisir d’être ensemble transpire plus et c’est ce qui est marrant. C’est ce qui amène le projet un peu ailleurs.
P.-Y. D. : SØUVENIR est un objet de partage entre nous. C’est savoir s’apporter des choses. Sur l’échelle du temps, notre méthode de compo n’est pas encore arrêtée et je pense qu’elle ne sera jamais figée. Lorsque nous composons à 4, nous sommes rapidement emportés par l’émotion et nous nous mettons à « jamer » pendant 30 minutes sur un morceau.
J. T. : Notre méthode, c’est l’instant, mais l’instant tu le perds vite. On s’amuse lorsque l’on « jame » mais après il faut savoir garder des choses, savoir où on veut aller.
A. R. : Notre méthode est de partir d’une impro, d’enregistrer sa totalité. Des fois on a des mémos qui durent 15 à 30 minutes, c’est énorme. Puis après on écoute tout cela à têtes reposées, on débroussaille, on trie parmi les idées, celles que l’on conserve et celles que l’on oublie. Ensuite, on amène autre chose, et on trouve le bon chemin.
J.T. : Pour revenir aux techniques d’écriture, pour Lourdes eaux par exemple, j’ai toujours écrit presque automatiquement en essayant d’être complétement en transe avec le sentiment qui me vient à ce moment-là. Et je pense que l’impro, c’est absolument ça, c’est se laisser porter par les uns et les autres.
P.-Y. D. : Nous sommes dans une phase où l’on expérimente pas mal de trucs. Nous nous cherchons pour être quelque chose à part entière et pas juste un groupe.
Chloé Antoniotti : C’est ça ! Nous avons tous des influences assez différentes et c’est cela qui est intéressant. On partage tout.
P.-Y. D. : Nous sommes une identité collective dans laquelle on peut tous se retrouver dont nous sommes fiers de porter.
Les lives sessions
Sur votre chaîne YouTube, nous pouvons découvrir tous vos titres clippés lors de lives sessions. Comment avez-vous eu l’idée de vous rendre dans un manoir au cœur de Targon, en Gironde, pour enregistrer ces clips ?
P.-Y. D. : Lorsque l’on a commencé à jouer ensemble à la rentrée 2020, et comme les conditions sanitaires ne nous permettaient pas de rassembler du public dans une salle, nous avons eu envie de proposer quelque chose à notre public. C’était une bonne façon de mettre réellement le projet en route. Et pourquoi Targon ? Parce que je connais cette demeure qui est à un copain. Je suis toujours vu dedans avec mon groupe. Le cadre et le lieu dégagent une certaine ambiance.
A. R. : C’était l’idée d’avoir une carte de visite. Avant cela, les gens ne pouvaient qu’écouter un soundcloud avec des enregistrements assez bruts et pas trop travaillés. Il n’y avait pas de vidéos.
J. T. : Le but était d’enregistrer Lourdes Eaux, une chanson qui avait 3 ans. C’était aussi l’idée d’acter les premières chansons afin qu’elles puissent être disponibles aux 4 coins de la France sans que cela passe par la scène.
C. A. : C’est vrai que pour présenter SØUVENIR, les lives sessions sont le moyen de montrer notre identité, ce que l’on dégage en plus de la musique que l’on joue.
Vous avez alors lancé un crowfunding qui a très bien marché pour réaliser ces lives sessions. Comment avez-vous rassemblé une équipe autour de vous ?
A. R. : Théo Thérès, l’ingé son qui est un ami à moi, est comme le 5ème membre du groupe. Il nous suit depuis un moment et il comprend la veine de SØUVENIR. Il nous a fait rencontrer d’autres techniciens. Au travers de ces rencontres, nous avons embarqué Erwan Charré, le réalisateur des clips de Targon, avec nous. Nous lui avons donné carte blanche.
J. T. : À chaque fois que l’on allait tourner, il rediscutait avec moi, me questionnait. Il avait lu 25 fois le texte des chansons pour se créer une narration. Et parfois, il n’y en avait pas besoin, parfois c’était juste une ambiance qu’il mettait sur une chanson. Je lui ai fait totalement confiance.
C. A. : Le rapport humain est très important pour nous. Nous nous sommes entourés de gens doués qui comprenaient bien la veine de notre projet. C’était bienveillant et nous étions en totale confiance. Et ça, c’est agréable.
Le live stream
En février dernier, vous avez fait un live stream, après l’enregistrement des lives sessions à Targon. Comment avez-vous vécu ce moment particulier, seuls devant la caméra ?
P.-Y. D. : Nous devons notre live stream à Stéphane Polge, notre ancien professeur du Cours Florent Musique. C’est un musicien exceptionnel. Il a beaucoup d’attrait pour les choses récentes. Étant très investi, il nous a proposé de réaliser un live stream dans sa nouvelle école, l’Atelier 440. Il a eu envie de montrer le projet et dire que l’école le soutenait.
J. T. : Encore une fois, on a eu des ami.e.s hyper investi.e.s. Valentin Piras, cadreur à Targon, est venu filmé, et Théo (l’ingé son ndlr) a rendu le projet techniquement possible.
P.-Y. D. : Théo, de par son parcours professionnel à la télé en tant qu’ingé son, nous a fait une régie son professionnelle incroyable dans un lieu qui n’était pas prévu pour ça, avec un matériel et budget plus que limité ! C’est tout ceci qui nous porte beaucoup, de voir le monde s’investir pour SØUVENIR.
A. R. : Ça crée de l’émulation. Pour l’instant, tel que nous le connaissons, le projet est indépendant et ça lui donne un côté plus humain. Nous prenons les différentes casquettes. Plus notre professionnalisation va demander de choses, plus ce sera compliqué de gérer tout nous 4. En même temps, c’est gratifiant de faire tout cela car le projet nous appartient, à l’inverse de gens qui délèguent et qui perdent tout.
J. T. : Pour répondre à comment nous avons vécu ce live stream, cela nous a permis de vérifier qu’un public réel change beaucoup de choses dans un live ! L’absence d’échanges fait qu’il n’y a pas d’instantanéité. Je me souviens qu’au fil des chansons, je me suis détendu et qu’à la fin, j’étais plus fatigué que dans un concert classique. C’était difficile sans public d’aller chercher cette force, d’avoir cette force.
A. R. : Pendant un concert, les 20 secondes qui suivent la fin d’une chanson sont une détente avec les applaudissements. En live stream, le public ne joue jamais. Il faut accepter ces moments de silence, de flottement.
J. T. : J’ai aimé l’idée de ne pas être resté dans l’entre soi. On a donné du smile. Antoine me disait que souvent il était joyeux alors que le titre n’invitait pas à cela. Il y avait une excitation qui était là.
P.-Y. D. : Malgré ce format difficile à appréhender, on a déjà pu s’éclater et puis donner un peu de ce que nous sommes aux gens.
Et quelle est la suite de l’aventure ?
P.-Y. D. : Nous sommes arrivés hier soir en Savoie, à Saint-Martin-de-Belleville, dans un chalet pour s’y confiner et faire notre résidence. Nous allons mettre à plat nos chansons pour débuter les enregistrements en studio, mettre sur pieds des maquettes, avec une expérimentation sonore. Nous faisons cela dans un cadre idéal hors Paris.
A. R. : Nous avons envie de créer à 4, de continuer de faire de nouvelles propositions. Il va falloir que l’on s’approprie l’idée du studio car c’est un endroit particulier, qui ne ressemble ni à la scène, ni à une live session, ni à un live stream. Nous allons également faire des tremplins sur Paris !
J. T. : Le projet a débuté avec mes chansons et je continue à en écrire. Ce qui est intéressant, c’est d’être dans le texte et d’écouter ce qui est proposé musicalement par le groupe. Toutefois, je n’ai pas envie d’avoir le monopole de l’écriture. Nous nous écoutons les uns les autres pour être dans une synergie qui nous permette d’atteindre une identité qui convienne à chacun. C’est un idéal absolu. L’objectif de cette résidence est de prendre le temps de s’écouter, de proposer des choses. Et de construire notre EP et les choses qui accompagneront tout cela.
C. A. : Et nous nous retrouvons ici pour ça, dans ce cadre idéal de création. Et cela nous fait du bien !
Propos recueillis par Laurent Bourbousson
Crédit Photo : photo 1 : Erwan Charré – photo 2 : Théo Thérès
Contemple, leur nouvelle live session est à découvrir le dimanche 9 mai 2021, sur leur chaîne YouTube.
Leur titre Parapente ouvrait La Playlist d’Ouvert Aux Publics de mars 21.
Le titre Lourdes eaux sera disponible sur Deezer le 30 mai.
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