VU : Avec la « Superésidence », qui est In ? , qui est Out ?

18 octobre 2016 /// Les retours
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Alain Cofino Gomez (Théâtre des Doms) et Sylvie Baillon (Le Tas de Sable – Ches Panses Vertes) ont rêvé d’une Superésidence. Celle-ci a réuni 6 comédiens d’univers artistiques différents pour la représentation unique de In/Out, au Théâtre de l’Entrepôt à Avignon. Retour.

Superésidence ©Serge Gutwirth

Superésidence ©Serge Gutwirth

Réunies sous l’impulsion de Alain Cofino Gomez, directeur du Théâtre des Doms, 4 structures (Le Tas de sable-Ches panses vertes, le Théâtre des Doms, Surikat Production, et le Théâtre de l’Entrepôt) ont pris le pari de convoquer 6 comédiens autour de la thématique In/Out pour créer un moment, ce fameux moment de théâtre qu’est la représentation. Laurent Plumhans et Camille De Bonhome, venus de Belgique, Marine Cheravola et Florian Martinet, tous deux d’Avignon, et Laetitia Labre et Rémi Hollant, de la région de Picardie, ont formé ce groupe avec leurs personnalités et leurs propres univers artistiques.
Il existait avant la date de représentation, très peu d’information sur le pitch, si ce n’est la thématique, et également très peu de photos, et pour cause, la création s’est construite en une dizaine de jours, sous le regard bienveillant de Sylvie Baillon, directrice de Le tas de sable – Ches panses vertes et d’Alain Cofino Gomez (retrouvez son interview ici).

Avec ces deux mots, le In et le Out, ils avaient la lourde tâche de construire et de déconstruire ensemble, de lancer des pistes de réflexion, dans le but d’un geste créatif artistique. Ils ont ainsi laissé ouvert la manne du tuyau de la création. Si le but secret de Sylvie Baillon et d’Alain Cofino Gomez étaient de dépasser le cadre la représentation et de bousculer le public, ils ont entièrement rempli leur mission.

Raconter In/Out, ce serait de faire le pari de raconter ce moment, durant lequel une certaine jouissance de créer s’est faite ressentir par moments, laissant place parfois à la difficulté de créer ensemble.

La notion de territoire, exploitée en début de représentation avec l’utilisation de la vidéo, convoque une idée d’ailleurs, de voyage. Cette piste de réflexion vite abandonnée à laisser place à celle de la vie du groupe créé de toutes pièces par leur candidature retenue pour le projet. In/Out prend alors des allures de laboratoire jouant avec les codes de la représentation. Le poétique et le réel sont les portes d’entrée de la création avec pour objectif, faire du compréhensible (le monologue de Florian Martinet provoque des rires et livre, toutefois, une réalité certaine sur la précarité des compagnies).

La notion d’appartenance au groupe est disséquée par les 6 comédiens. Partant du fait de savoir qui se situe à l’intérieur ou à l’extérieur du groupe, une série de dialogues truculents de drôlerie, mais révélateur de ce que le groupe a pu vivre en vase clos durant les jours de création, voit le jour.
Le groupe va ainsi se disloquer sous les yeux du public. Chacun fuira, allant dans le out (en coulisses) chercher ce qui pourrait faire acte de création, réintroduira l’espace scénique pour tenter d’imposer son idée. Car effectivement, l’enjeu de In/Out est de faire adhérer l’ensemble du groupe à une iodée pour créer un moment.
Les images des coulisses sont projetées en fond de scène. Filmé à l’aide d’un portable, Rémi Hollant insuffle un décalage dans la proposition et exploite la notion du In tout en étant dans le Out. Il est jubilatoire dans son monologue autour de la représentation. Et de le voir apparaître en boxer et talons aiguilles, cela interroge sur l’image que tout un chacun renvoie à l’autre.

Dans ce va-et-vient du dehors au dedans ou du dedans au dehors, où tout part en tous sens, il y a ce moment suspendu, durant lequel tous se retrouvent amassés autour de Camille de Bonhomme, chantant Reality, sorte de réinterprétation du tableau d’Eugène Delacroix, La Liberté guidant le peuple. Cette forme de rêverie convoquée rend l’esprit vagabond, qui se fait Out à son tour.

Superésidence ©Serge Gutwirth

Superésidence ©Serge Gutwirth

Ils finiront, tous, assis sur un banc d’école et diront réellement leur difficulté dans l’acte de création et s’interrogeront de savoir s’ils ont réussi ou non. Chacun partira du plateau, laissant Laurent Plumhans dire ces mots Tu l’entends ce qui flotte, tu l’entends ce qui bouge, tu l’entends ce qui déborde.
Peut-être que le public l’aura entendu, peut-être l’aura-t-il compris, ou l’aura-t-il ignoré, mais il aura saisi cette folle envie de créativité qui anime les artistes émergents avec des projets hors du commun.

Certainement que la Superésidence, projet indéfinissable quoi qu’il en soit, aurait mérité d’un peu plus de hargne ou de rentre-dedans de la part du groupe. Si on peut supposer cela, on peut reconnaître, sans problème, que c’est ce genre de projet qui fait défaut à Avignon, celle de libérer complètement l’acte créatif des arcanes de production trop policés. Le groupe n’aura donc pas démérité les applaudissements en dehors de la salle. Et pour ce, merci à vous 6.

Superésidence – In/Out a été vu le 28 septembre 2016, à l’Entrepôt-Cie Mise en scène, Avignon.

Laurent Bourbousson

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