ITW – FESTIVAL LES HIVERNALES : Jean-Antoine Bigot pour Derrière le blanc

19 février 2017 /// Les interviews
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Jean-Antoine Bigot, de la Compagnie Ex-Nihilo, présente 4 performances à la Maison Jean Vilar, dans le cadre du festival Les Hivernales. Interview.

Que la danse croise la peinture, ce n’est pas nouveau. Mais que ce soit Jean-Antoine Bigot, de la compagnie Ex-Nihilo, qui se lance dans ce défi, il y a quelque chose de surprenant dans un premier temps, puis une évidence lorsque votre regard se porte sur ses tableaux.

Avec Derrière le blanc, le public va vous découvrir peintre. On devine, avec l’exposition Silhouettes à la Maison jean Vilar, l’histoire d’une passion qui vous anime depuis un certain temps. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Jean-Antoine Bigot :
C’est le fait d’être danseur qui m’a permis de me remettre à la peinture et au dessin, par le biais des résidences. Je dessinais avant de pratiquer la danse et c’est lors d’une résidence, avec Héla Fattoumi et Éric Lamoureux à Angers, que tout s’est relancé. Et depuis, je n’ai pas arrêté. Au début, je faisais des formats carnets, cartes postales. Dans mon studio en Normandie, où je n’ai pas de contrainte de place, je me suis lancé dans les grands formats. Ce sont ces formats qui ont placé l’engagement corporel dans leur réalisation.

Effectivement, il y a une grande place à la physicalité dans cette proposition, comme dans toutes celles que vous proposez avec la compagnie. Mais ici, le fait d’être seul renforce celle-ci et amène le regard sur cette sorte de combat que vous semblez mener avec votre planche d’où émanera un visage.
J.-A. B :
Le format des planches fait que je m’engage très physiquement. Les peintures sont au sol, et les seules fois où je les mets debout, c’est pour voir l’équilibre des peintures. Sinon, je me lève, je m’accroupis, et quand le dessin que je projette ne vient pas, j’y vais fortement. C’est pour cela que je travaille sur du bois car je percerai la toile. A force de faire cela dans mon studio, tout seul, je me suis lancé un défi, faire une plaque en une vingtaine de minutes en dansant. J’ai invité Pascal Ferrari, notre musicien, a partagé ce temps, pour Avignon. Il jouera en live.

Est-ce qu’il existe une écriture précise pour chacun de vous ?
J.-A. B :
Il y a une trame. La construction est claire, la qualité de danse l’est aussi. Pascal a sa matière musicale, mais il n’a aucun repère temporel pour son jeu. Nous avons chacun de la liberté dans nos partitions.

Est-ce que l’on peut parler de Derrière le blanc comme d’un acte performatif ?
J.-A. B :
Oui, tout à fait. Il y a un quelque chose de l’instant durant lequel les choses doivent se réaliser comme ça, où il y a un peu d’incertitude. Je ne sais pas à quoi je vais aboutir lorsque je commence la plaque. Je pars sur l’idée de mes grandes têtes, mais je ne sais à quoi elles vont ressembler. Je ne fais pas de projection de ce que je vais faire. J’ai mon temps pour faire le fond de la peinture, celui de la mine de plomb et du pastel. Il faut que je parte de ce qui advient sur la plaque, d’un détail. Pour les 4 jours de représentation, je n’effacerais pas les productions, ce que je faisais jusqu’à présent. Je vais les stocker et constituer un vécu de ces jours d’Avignon.

Est-ce que cette performance est une forme de mise à nu pour le chorégraphe que vous êtes ?
J.-A. B :
Oui, il y a de cela et ça fait du bien. Cette proposition est mon histoire, un petit quelque chose que j’ai en parallèle. Du travail de groupe, que je mène avec la compagnie, travailler seul permet de se recentrer. En même temps, est-ce que je suis vraiment seul ? Avec Pascal, cela fait 15 ans que l’on travaille ensemble, et il est sur le plateau, Anne Le Batard a apporté son regard. Mais, je suis seul dans ma relation à l’objet, avec sa manipulation. Derrière le blanc est la suite logique des propositions que j’ai mené avec la compagnie comme dernièrement avec In-Paradise/Paradis is enough ou encore Assemblements, dans lesquelles l’objet a toute sa place. C’est bien d’être seul pour avoir des repères, pour mieux les exploiter par la suite.

Derrière le blanc aura donc une suite ?
J.-A. B :
L’univers qui m’entoure, les carreaux de plâtre, le scotch, amorce un nouveau projet autour de la matière. Avec Rolando Rocha, danseur de la compagnie, nous avions amorcé, en 2013, un travail qui est resté à la forme de balbutiement. Cette ébauche m’a inspiré pour Derrière le blanc. Et en novembre prochain, nous nous retrouverons pour réactiver nos pistes de réflexion et les enrichir de cette expérience. Donc, oui, il y aura un nouveau projet nourri de cette performance.

Laurent Bourbousson

Photo : ©Agnès Mellon

Ce que l’on peut en dire : L’enjeu de cette proposition, découverte lors de l’édition 2015 de Question de danse (Marseille), place son auteur dans un inconfort certain. Jean-Antoine Bigot rend palpable la tension qui se joue entre lui et sa planche. Il conjugue les gestes du peintre avec les mouvements du danseur, qu’il est, dans un tourbillon rageur. Et c’est dans une fulgurance que viennent naître ses gueules.

Derrière le banc sera présentée le lundi 20, mardi 21, mercredi 22 et jeudi 23 février à 13h00, à la Maison Jean Vilar. Vernissage de l’exposition Silhouettes de Jean-Antoine Bigot lundi 20 à la suite de la représentation.
Conception | Jean-Antoine Bigot
Regard complice | Anne Le Batard
Musique live | Pascal Ferrari

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