[ITW] Emilio Calcagno pour 7×7 à l’Opéra du Grand Avignon

17 mai 2023 /// Les interviews
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Directeur de la danse au Ballet de l’Opéra du Grand Avignon depuis septembre 2021, Emilio Calcagno insuffle une nouvelle énergie. Il donne rendez-vous à 7 chorégraphes de la danse contemporaine et à 7 interprètes pour une soirée exceptionnelle à vivre le vendredi 19 mai 2023. Un 7×7 qui s’annonce prometteur. Interview.

Emilio Calcagno écrit une nouvelle page de l’histoire du Ballet de l’Opéra du Grand Avignon. C’est l’histoire d’une ouverture sur le monde des écritures chorégraphiques multiples de la danse contemporaine. Avec son concept 7×7, il entraîne chorégraphe et danseur à partager le plateau. Enthousiasmant programme.

Renouveler les écritures chorégraphiques au sein du Ballet

En tant que chorégraphe, lorsque vous prenez la décision de venir à Avignon pour le poste de directeur de la danse du Ballet de l’Opéra, quelles sont vos sensations ? 

Comme vous l’avez rappelé, j’ai ma compagnie et diriger des danseuses et danseurs m’a toujours plu. Je viens également d’un ballet puisque j’ai fait ma carrière en tant que danseur permanent chez Preljocaj. C’est vrai que cette notion de groupe dansant, nous le retrouvons dans mon travail personnel.
L’envie de postuler à Avignon était réelle. Je savais que c’était un ballet auquel il fallait donner une nouvelle vision par les nouvelles écritures chorégraphiques. J’aime bien cette idée de challenge.
Vous savez, lorsque vous êtes né au pied d’un volcan, je suis italien né en Sicile, on aime bien ce genre de challenge. Il est vrai que depuis mon arrivée, il y a un an et demi, il y a déjà eu énormément de choses qui se sont passées. Il était nécessaire à la fois, de renouveler le ballet et lui donner une visibilité qui est en train de prendre place. 

Depuis que vous êtes à la direction, vous n’avez de cesse de confronter les danseuses et danseurs du ballet aux chorégraphes de danse contemporaine. Comment le corps du ballet a réagi ? 

Le temps est nécessaire pour ce genre de changement. Vous ne pouvez pas, et ce n’est pas mon intention, révolutionner un ballet. Lui-même a son histoire mais il faut aller de l’avant. L’avant va très vite aujourd’hui. Il y a énormément de compagnies de danse, énormément d’écritures. Il fallait à la fois amener d’autres chorégraphes car je suis intéressé que d’autres écritures chorégraphiques traversent le corps des interprètes. Évidemment, les corps évoluent au sein du ballet.
À mon arrivée, j’ai trouvé un ballet inscrit dans le néo-classique mais je ne crois pas que le problème pour un danseur soit sa formation. Tout est question d’ouverture à ce qui se passe dans le monde chorégraphique. Je prends l’exemple des danseurs de l’Opéra de Paris : de formation classique, leur répertoire aujourd’hui est très contemporain à 80%.
J’ai été engagé pour renouveler le ballet avec une écriture contemporaine et non pas pour faire du néo-classique, tout en respectant son ADN. Je travaille sur une écriture qui peut s’approcher de leur savoir tout en l’utilisant différemment. Et j’ouvre leur curiosité, car un danseur issu d’une formation quelle qu’elle soit, c’est son ouverture au monde chorégraphique qui fera de lui le bon danseur. 

Une nouvelle visibilité pour le Ballet

La semaine dernière, vous présentiez avec le Ballet de l’Opéra du Grand Avignon, Storm au 104 à Paris dans le cadre de « Séquence Danse Paris 2023 » (photo ci-contre ©Studio Cédric Delestrade). C’était une première pour le corps du ballet de se confronter au public parisien ?

Que je sache, oui. Le fait de se confronter à un public d’un festival est nouveau pour eux. Le public parisien, c’est encore autre chose car il est habitué à voir énormément de choses.
Ça a été une belle surprise. Le projet a été très bien accueilli et je suis heureux que les danseurs du ballet aient eu cette possibilité de danser à Paris.
Storm est une création particulière. C’est la première création que j’ai faite avec eux sans vraiment les connaître, et qui met en scène des ventilateurs industriels. Pour des danseurs qui n’ont pas forcément l’habitude de danser avec les objets, c’est vrai qu’au début c’était perturbateur. Lorsque vous les voyez aujourd’hui, ils prennent plaisir à danser ce genre de création. Mais il aura fallu du temps et c’est ce qu’il faut pour mûrir ce genre de proposition.

7×7, une invitation faite aux chorégraphes, aux danseurs et aux publics

Pour la soirée 7×7, vous conviez 7 chorégraphes pour 7 interprètes pour 7 chorégraphies de 7 minutes. Quand on lit la liste des chorégraphes invités (Olivier Dubois, Johanna Faye, Edouard Hue, Leila Ka, Sylvère Lamotte, Rosalba Torres Guerrero, Andrea Costanzo Martini), on a hâte de découvrir le travail. Comment avez-vous fait pour réunir un tel plateau ? 

Il y a du beau monde en effet. J’aime beaucoup ce genre de concept. J’ai une vision de la danse qui est faite à la fois de grands formats sur des grands plateaux, avoir du monde sur scène, mais également de formes plus resserrées. 
En arrivant à l’Opéra du Grand Avignon, j’ai tout de suite imaginé ce projet car il fallait créer des pièces pour le répertoire qui puisse intéresser le public et avoir un sens pour les danseurs. Au-delà des grandes créations, je me suis questionné sur plusieurs choses. La première, créer ce tête-à-tête chorégraphe-danseur. La seconde, il me semblait évident de faire un cadeau aux danseurs. En effet, travailler seul avec un chorégraphe est un privilège. C’est quelque chose qui est unique dans son parcours. Puis, je me suis vraiment questionné sur ce qu’est un interprète lorsque l’on danse avec un chorégraphe : qui crée quoi, comment on utilise cette complicité. Le fait de réunir 7 écritures différentes me semblait être à la fois utile pour le public pour traverser 7 écritures différentes. 
J’ai vu la totalité des propositions et le résultat est étonnant. 

En invitant ces chorégraphes, aviez-vous déjà l’idée des duos que vous alliez composer ou bien avez-vous laissé la totale liberté au chorégraphe de choisir leur interprète ? 

J’ai uniquement mis à disposition le ballet. J’ai parlé du projet avec l’ensemble des danseurs et toutes et tous ont passé une audition. C’est vraiment le chorégraphe qui a choisi son interprète. Ils ont tous fait un très bon choix car chaque binôme a une force unique. Et j’ai même des surprises ! 

Vous avez le chic pour choisir les chorégraphes avec lesquels vous faites travailler le corps du ballet.

Je pense que lorsque l’on fait ce métier il faut avoir le nez. Le choix n’a pas été évident. Je n’ai pas appelé que des chorégraphes ami·e·s. J’ai appelé les chorégraphes que je trouvais juste pour ce projet à ce moment-là. Le chic, je n’en sais rien mais c’est l’expérience qui prime. J’aime beaucoup réussir les choses mais je reconnais lorsque je me trompe. J’aime bien ce genre de défi et partager des moments de danse.

Est-ce que c’est un projet que l’on retrouvera saison après saison, dans la programmation de l’Opéra du Grand Avignon ? On imagine que vous avez d’autres chorégraphes en tête.

Je n’en sais rien. On verra par la suite, mais ce concept me tient à cœur par son originalité et également parce qu’il questionne autre chose : comment le chorégraphe se met en jeu avec un interprète qu’il ne connaît pas ? Donc, nous verrons bien mais je peux vous certifier que le recrutement n’a pas été si évident que ça (rires).

Propos recueillis par Laurent Bourbousson
Crédit photo : Portait Emilio Calcagno ©LQ

Lors de l’interview, nous avons également questionné Emilio Calcagno sur les pièces Boléro d’Hervé Koubi et L’Oiseau de Feu d’Edouard Hue, créées en avril dernier qui seront reprises durant le Festival Off d’Avignon à La Scala Provence. Vous retrouverez cette partie d’interview dans La Revue #8 spéciale Festival Off23, mise en ligne le 1er juillet sur le site (découvrir les anciens numéros ici). 

Générique

7×7 sera créé le vendredi 19 mai à l’Opéra du Grand Avignon, à 20 heures.

Concept Emilio Calcagno / Chorégraphies Olivier Dubois, Johanna Faye, Edouard Hue, Leila Ka, Sylvere Lamotte, Rosalba Torres Guerrero, Andrea Costanzo Martini / Lumières Idalio Guerrero / Costumes Ateliers de l’Opéra d’Avignon
Les duos : Andrea Costanzo Martini / Béryl de Saint-Sauveur – Leila Ka / Ari Soto – Edouard Hue / Leo Khebizi – Rosalba Torres Guerrero / Kyril Matantsau – Sylvère Lamotte / Lucie-Mei Chuzel – Olivier Dubois / Sylvain Bouvier – Johanna Faye / Anastasia Korabov

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